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Convention collective unique médico-sociale
Le retour de l’Arlésienne

03/05/2010

Le secteur se dotera-t-il un jour d’une convention collective unique ? Le débat revient à la une…et déjà les dissensions (ré) apparaissent sur le périmètre à couvrir et sur le conducteur du projet.

Véritable serpent de mer, le débat sur la création d'une convention collective unique (CCU) pour le secteur sanitaire, social et médico-social non lucratif refait surface. À l'origine de ce come-back : la Fédération des établissements hospitaliers et d'aide à la personne à but non lucratif (Fehap) qui, à l'issue de son assemblée générale du 23 mars, a annoncé son intention d'être « moteur » dans la construction d'une CCU pour... l'ensemble du champ de la protection sociale non-lucrative. Un périmètre XXL puisqu'il couvre la branche associative sanitaire, sociale, et médico-sociale (Bass), l'aide à domicile, les centre sociaux et socioculturels, l'animation, la mutualité... Ce chantier, la Fehap souhaite le lancer parallèlement aux négociations avec les syndicats de salariés sur la révision de la convention collective nationale (CCN) de 1951. Et ce sans attendre. « Notre objectif est d'amorcer une dynamique avec l'ensemble des fédérations d'employeurs gestionnaires des conventions collectives du secteur au cours des six prochains mois », explique Sylvie Amzaleg, directrice adjointe des relations du travail à la Fehap.

Querelle de périmètre

La réaction - contre-offensive - du Syndicat d'employeurs associatifs action sociale et santé (Syneas) a été immédiate. Le 8 avril, lors du comité directeur d'Unifed, le collège patronal de la Bass, le Syneas a invité ses partenaires : Fehap, Fédération nationale des associations gestionnaires au service des personnes handicapées (Fegapei), Croix-Rouge française, Fédération nationale des centres de lutte contre le cancer, à constituer un groupe de travail pour réfléchir à l'élaboration d'une CCU limitée au périmètre de la Bass. Une manière de préparer une issue de secours en cas d'échec des négociations sur la CCN de 1966 ? « Comment construire une CCU sans une branche professionnelle derrière ? Avec sa proposition, la Fehap souhaite-t-elle l'implosion de la Bass ? Celle de l'Unifed ? », s'interroge Jean-Luc Durnez, directeur général du Syneas. « Dès 2008, nous avons considéré la rénovation de la CCN de 1966 comme la première étape nécessaire vers une convention unique de branche. Il sera compliqué d'harmoniser les cinq conventions collectives de la Bass [1]. C'est sur ce chantier que nous devons travailler ensemble », insiste-t-il. Ensemble ? Pas si sûr... La Fehap ne semble pas être disposée à reconsidérer le périmètre géographique de son projet. « La CCU à laquelle nous aspirons doit couvrir l'ensemble des activités de nos adhérents. Tel est le mandat qu'ils nous ont confié », argue Sylvie Amzaleg. De son côté, la Fegapei a, d'ores et déjà, répondu favorablement à l'invitation de la Fehap. Une occasion de réanimer son propre projet de CCU ?  « Ce que l'on suggérait, en 2007, commence aujourd'hui à faire son chemin », se réjouit Philippe Calmette, son directeur général. « Deux possibilités de convention unique sont ouvertes : une convention unique d'un bloc sur l'ensemble du périmètre de la protection sociale non lucrative ou un socle commun avec des déclinaisons par champ d'activité. Si Unifed est le lieu naturel et historique des discussions et des échanges autour d'une convention collective unique, ce n'est pas le seul », observe-t-il encore.

Métiers identiques

Sans surprise, le Syndicat national des associations laïques employeurs du secteur sanitaire, social, médico-éducatif et médico-social (Snaless) s'inscrit dans la même ligne. Alors qu'il cherche à se faire accepter à la table des employeurs sur la CCN 66, le syndicat voit dans la relance du débat sur la construction d'une CCU, l'opportunité de revenir dans le jeu (2). « Le Snaless entend tenir toute sa place dans la réflexion et dans les modalités de réalisation de ce projet. Pourquoi limiter la convention unique à la Bass, alors que l'aide à domicile est  également soumise aux obligations de la loi 2002.2 ? Sur le champ du handicap, il y a des métiers identiques dans les établissements sociaux et médico-sociaux et dans l'aide à domicile. Une CCU permettrait de faciliter les parcours professionnels des salariés », considère Pierre Queille, président du Snaless.

Si la priorité d'USB-Domicile, organisme patronal de l'aide à domicile est de boucler - et signer -, après neuf années de négociations, sa propre convention collective de branche, il devrait examiner l'invitation de la Fehap avec sérieux. « Nous sommes ouverts à la discussion, mais nous voulons en savoir plus sur le projet. Quel chemin pour y arriver ? Quel horizon ? Comment fait-t-on ? La Fehap peut être le moteur de cette réflexion, cela ne signifie pas pour autant qu'elle en sera la conductrice », nuance malicieusement Emmanuel Verny.

Un concurrent à l'Uniopss ?

Un autre dessein de la Fehap a suscité des interrogations et des grincements de dents : celui « d'initier et promouvoir une confédération des organismes privés à but non lucratif dans le champ de la protection sociale ».  Cette proposition (corollaire de la CCU ?) devrait être au menu des entretiens que la Fédération souhaite organiser avec l'ensemble de ses partenaires du secteur non lucratif. « La fusion du SOP et du Snaséa qui a donné naissance au Syneas a permis de réduire le nombre des représentants des employeurs dans le secteur. Et voilà que la Fehap veut à présent créer une nouvelle instance ! Quelle place occuperait cette confédération alors qu'existe déjà l'Unifed, l'Association des employeurs de l'économie sociale ou le Conseil des entreprises, employeurs et groupements de l'économie sociale ? », questionne Jean-Luc Durnez, directeur général du Syneas. Et  la Fehap de vouloir rassurer : « Cette proposition n'est pas nouvelle. Elle est inscrite dans notre projet stratégique adopté en 2007. Il n'y pas de structure juridique derrière ce terme de confédération.  Le but est de créer plus d'unité entre les acteurs afin de renforcer le poids du secteur privé à but non lucratif », explique Sylvie Amzaleg.

Des arguments qui sonnent faux aux oreilles d'Hubert Allier, directeur général de l'Union nationale interfédérale des œuvres et organismes privés sanitaires et sociaux (Uniopss). « Cette confédération existe déjà ! Elle s'appelle l'Uniopss ! » Et de rappeler le pedigree de celle-ci : des adhérents associatifs, mutuelles, fondations, coopératives, une représentation de 75 % du secteur privé non lucratif, des instances régionales. « La légitimité de la Fehap se limite à la CCN de 1951 alors qu'avec ses adhérents, l'Uniopss couvre l'ensemble des conventions collectives et des accords collectifs du secteur. » Tout en insistant sur l'importance de distinguer la fonction « mouvement » de la fonction « syndicats d'employeurs », Hubert Allier ajoute : « L'Uniopss a toujours affiché sa volonté de rechercher des coopérations avec les syndicats d'employeurs et d'autres cousins de l'économie sociale. De fait, pourquoi ne pas utiliser notre mouvement comme lieu de réflexion sur cette CCU ? »

Le constat est sans appel : à peine relancé ce chantier suscite déjà des remous. La Fehap a-t-elle ouvert la boîte de Pandore ? Si les organismes employeurs et les unions associatives sont unanimes sur la nécessité de rendre plus cohérent le paysage conventionnel du secteur sanitaire et social privé non lucratif,  sauront-t-ils - enfin- s'entendre pour œuvrer dans ce sens ? À défaut, la convention collective unique sera l'éternelle arlésienne du secteur.

 

(1) La convention collective nationale (CCN) du 15 mars 1966, la CCN du 31 octobre 1951, celle de la Croix-Rouge française, la CCN des centres de lutte contre le cancer et les accords spécifiques aux centres d’hébergement et de réinsertion sociale. (2) Voir ce numéro page 8
Nadia Graradji

Syndicats de salariés : du pour et du contre

La double annonce de la Fehap (révision de la CCN 51 et réflexion autour d’une convention collective unique – CCU – dans l’ensemble du secteur privé non lucratif) a été accueillie fraîchement par les syndicats de salariés. La CGT déclare ne pas être opposée à un projet de CCU à condition que « ce texte soit de haut niveau » et « porteur d’amélioration pour tous les salariés ». Position partagée par la CFDT qui souhaite que « cette négociation soit une réelle opportunité pour les salariés ».  La CFTC et la CGC sont, en revanche, favorables à une CCU circonscrite à la branche associative sanitaire, sociale et médico-sociale (Bass). Pour le syndicat FO, « regrouper plus de sept conventions collectives de diverses branches d’activité en une seule, pose la question d’un socle commun des garanties collectives ». Et d’avertir : « Il est hors de question d’accepter une convention collective qui rassemblerait des garanties collectives minimales, qui pourraient éventuellement être améliorées dans les établissements après négociations d’accords d’entreprises ».






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