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Évaluation externe
Ultime compte à rebours

21/05/2014

Dernière ligne droite pour les établissements et services qui doivent avoir fait réaliser leur évaluation externe d’ici à la fin de l’année. Entre engagements tardifs et difficultés d’organisation, le doute plane sur l’échéance : sera-t-elle tenue par tous ? En jeu : le bon renouvellement de près de 25 000 autorisations de fonctionnement.

Embouteillages en vue ? Environ 25 000 établissements et services sociaux et médico-sociaux (ESSMS) devront avoir fait procéder à leur évaluation externe avant le 3 janvier 2015 [1]. Fin 2013, sur les quelque 7 000 structures engagées dans la démarche, un peu moins de 5 000 l’avaient finalisée. Soit… 20 % seulement. Des données préoccupantes issues des rapports d’activité des organismes habilités, compilées semestriellement par l’Agence nationale de l’évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux (Anesm), témoignant toutefois d’une certaine accélération depuis le précédent décompte fin juin 2013.

Une cadence accélérée

À quelques mois de l’échéance, où en sont les 70 % d’ESSMS qui étaient encore au point mort il y a à peine six mois ? Difficile à dire avant le prochain point d’étape de l’Anesm, en juillet. Une certitude : le retard n’est pas encore comblé. La deadline pourra-t-elle alors être respectée ? « Aucun de nos adhérents ne s’est manifesté pour signaler qu’il serait hors délai », commente Adeline Leberche, directrice du social et du médico-social de la fédération d’employeurs Fehap, qui sonde régulièrement les membres de son organisation. Mais, en avril dernier, les données n’étaient exploitables que dans cinq régions (taux de réponses suffisants). « En Bretagne notamment, 87 % des répondants avaient entamé ou finalisé leur évaluation et 44 % l’avaient adressée aux autorités, note Adeline Leberche. Tout va-t-il pour le mieux dans le meilleur des mondes ? Ou les retardataires n’osent-ils pas en parler ? », s’interroge-t-elle. Les semaines à venir seront décisives pour les gestionnaires comme pour les autorités de tarification, car l’enjeu est de taille : celui du bon renouvellement des autorisations de fonctionnement.

Un manque de temps et de moyens

Comment expliquer cette situation concernant une procédure inscrite dans la loi il y a douze ans ? Outre les appréhensions initiales (crainte du contrôle, de confusion avec la certification sanitaire…), de nombreux obstacles ont émaillé son appropriation : édifices législatif, réglementaire et institutionnel stabi-lisés tardivement, reports des échéances, interrogations méthodologiques et pratiques… Sans oublier un préalable : l’évaluation interne. « Sa bonne réalisation conditionne la réussite de l’évaluation externe », prévient Marc Bonnet, intervenant technique au Comité national des acteurs de prévention spécialisée (CNLAPS).
Autre argument des gestionnaires : le manque de temps et… d’argent. « Des structures doivent s’engager dans un processus d’amélioration continue de la qualité, chronophage pour les équipes, sans en avoir les moyens », pointe Jean-Luc Darguesse, vice-président du Groupement national des établissements publics sociaux et médico-sociaux (Gepso). Face aux demandes répétées du secteur pour obtenir une enveloppe ad hoc, l’administration n’a pas flanché. Toutefois, la question trouve des solutions sur le terrain. « Dans notre organisation, elle fait l’objet d’un amortissement sur trois ou cinq ans », explique Ludovic Soufflard, conseiller technique à l’association Coallia. Par ailleurs, certains financeurs ont pris le parti d’aider des ESSMS. « Ceux réalisant des excédents sont autorisés, sur demande, à les conserver à hauteur du coût moyen d’une évaluation. Pour les autres, des crédits non reconductibles peuvent être versés en fonction des disponibilités », illustre Danièle Rolland, chargée de mission à la direction de l’autonomie à l’agence régionale de santé (ARS) de Bourgogne.

Un engorgement redouté

Les pouvoirs publics battent donc le rappel. Publication en décembre 2013 d’une circulaire [2] pour répondre aux « nombreuses interrogations des gestionnaires comme des services instructeurs », diffusion en mars dernier d’un guide d’aide à la contractualisation avec les organismes habilités… « Un bon outil, mais il arrive un peu tard », regrette Aurélien Ducloux, chargé de mission évaluation à la Fédération nationale des associations d’accueil et de réinsertion sociale (Fnars).
En outre, l’Anesm pilote une centaine de demi-journées d’aide à la rédaction du cahier des charges, organisées par les ARS, qui se tiendront d’ici au mois de septembre à destination des retardataires les plus en difficulté [3]. À leur issue, les autorités devront « disposer d’un engagement de chaque structure quant au lancement de l’évaluation externe ». Un « dispositif distinct » est prévu pour celles relevant des conseils généraux… sans autre forme de précision.

Les organismes habilités en ligne de mire

Si, selon l’administration, seuls 6 % des ESSMS concernés déclaraient, il y a deux ans, ne pas être en mesure de respecter l’échéance, pour les autres, plus confiants, la dernière ligne droite ne sera pas forcément sans obstacles. Ainsi, il peut s’écouler plus d’un semestre entre l’élaboration du document de mise en concurrence et le rendu définitif du rapport. « Les gestionnaires doivent se lancer avant l’été », insiste Didier Charlanne, directeur de l’Anesm. De plus, quelle latitude auront les commanditaires dans le choix du prestataire ? Les regards se tournent vers les organismes habilités. « Les plus en vue sont saturés de demandes, affirme François Charleux, consultant et membre fondateur de l’Association française des évaluateurs externes (AFEE). Des gestionnaires, bien qu’ayant contacté plus d’une dizaine d’évaluateurs, n’ont reçu qu’une seule réponse. » Et d’ajouter : « Certains organismes n’ont pas une connaissance suffisante du secteur ou ne sont pas actifs. » Des inquiétudes nuancées par Didier Charlanne, pour qui les 70 % de « non actifs » fin 2013 laissent justement une marge de manœuvre : « D’autant que parmi eux, il y a des sous-traitants des premiers, avec donc une expertise. Je les ai invités à mutualiser leurs compétences afin de poursuivre la dynamique. »

Autre enjeu : la qualité des rapports remis aux autorités. Pour ceux ayant essuyé les plâtres, les retours sont mitigés. « Des directions les trouvent utiles dans la prise de décision. D’autres estiment que les préconisations relèvent du détail et auraient préféré des propositions structurelles plus ambitieuses », relaie Aurélien Ducloux. « Les ESSMS retardataires devront particulièrement veiller à ce que le travail fourni par l’évaluateur couvre l’intégralité des exigences réglementaires », recommande ainsi Didier Charlanne.

Des outils d’analyse communs

L’hétérogénéité des documents transmis aura-t-elle des incidences sur leur analyse ? Les services instructeurs pourront-ils garantir un traitement équitable ? Pour relever le défi, ces derniers aussi se mettent en ordre de marche. « Nous nous sommes immédiatement rapprochés de l’ARS et du conseil général du Nord pour concevoir des grilles d’analyse communes, explique Cyril Carbonnel, chef du service de la qualité et des financements au conseil général du Pas-de-Calais. En cas de compétence conjointe, chaque administration en analysera la moitié. »
Les autorités seront-elles indulgentes quant au délai de remise ? « La réglementation donne des échéances de réalisation, mais pas de transmission… », relève Cyril Carbonnel. « Nous nous assurons que tous les ESSMS sont bien engagés avec un calendrier précis et faisons tout pour éviter une absence de rendu, indique François Grimonprez, directeur de l’efficience de l’offre à l’ARS Pays de la Loire. Pour ceux qui remettront un rapport soulevant des préoccupations, nous travaillerons avec les gestionnaires. » Ce qui impliquera une demande de renouvellement expresse. Problème : « Faute de décret en Conseil d’État, nous n’en connaissons toujours pas les modalités », déplore Adeline Leberche.
Davantage que la remise du document, ce sont bien ses suites qui importent. François Grimonprez craint même un effet post-évaluation : « Quels plans d’action seront réellement conduits ? Après l’énergie dépensée par les structures, le soufflé ne va-t-il pas retomber ? » Une situation qui serait dommageable car, estime Ludovic Soufflard, « l’évaluation intègre la question du sens, via la bientraitance et la mise en œuvre du droit des usagers. »

[1] Ceux autorisés et ouverts avant le 3 janvier 2002.

[2] Instruction n° DGCS/SD5C/2013/427 du 31 décembre 2013

[3] Instruction n° DGCS/5C/ANESM/2014/100 du 4 avril 2014

Justine Cannone

Point de vue

Nathalie Sarge, directrice d’établissement et service d’aide par le travail (Esat) à La Glacerie (Manche)

« Nous avons anticipé l’évaluation externe en créant un comité de pilotage fin 2013 réunissant la direction générale de l’association et les directions d’établissements. Cet engagement collectif a constitué un important travail en amont, dont on ne peut faire l’économie. Ce comité a validé le cahier des charges en novembre. La visite sur site de l’évaluateur, pendant deux jours et demi en avril dernier, a été très dense : elle était attendue tant de la part des personnels que des travailleurs handicapés. La formalisation et la finalisation du rapport, après débat contradictoire sur la base d’un prédocument, devraient intervenir en juin. J’attends de cette évaluation une lecture objective qui puisse être profitable à la structure pour progresser. Elle constitue pour moi un levier en termes de management. »

Publié dans le magazine Direction[s] N° 121 - juillet 2014






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