Fini le temps où « l'éduc'chef » volait au secours de l'éducateur « de base » pour remettre un enfant récalcitrant à sa place. Devenu chef de service éducatif ou cadre socio-educatif (CSE), il fait désormais partie intégrante de l'équipe de direction.
Les mieux lotis ont un statut de cadre et occupent un poste de cadre intermédiaire, entre la direction et l'équipe qu'ils animent. Patricia Trungel-Legay, cadre socio-éducatif dans deux maisons d'enfants à caractère social (Mecs), dans la Meuse, exerce un rôle hiérarchique auprès de trente professionnels diplômés. « J'appartiens à l'équipe de direction. Je propose chaque année une notation et une évaluation de ces personnels au directeur. »
Les établissements ont changé. Ils se professionnalisent, adoptent des démarches qualité, se restructurent et voient même leurs directeurs en diriger plusieurs. Les chefs de services éducatifs peuvent alors être promus adjoints de direction, avec parfois pour seul galon, l'ancienneté.
Certains sont amers: « On met un éducateur à la place du chef de service, un chef de service à la place du directeur... qui s'en va gérer plusieurs établissements, regrette Gilbert Peyre, devenu adjoint de direction d'un foyer d'adolescents et d'un centre de formation professionnelle dans le Rhône. Nos tâches? La conduite des projets mais aussi la gestion des horaires et du planning qui nous prend un temps fou. Nous n'intervenons plus dans le quotidien. » Ce que regrette aussi Renée Guillon, cadre socio-éducatif dans la fonction publique hospitalière dans les Hauts-de-Seine. « Je n'ai pas été embauchée pour ce que je fais et suis submergée par l'administratif. Tous les jours, il faut intégrer quelque chose de nouveau: la qualité, la sécurité, la bonne gouvernance, le projet de médicalisation des systèmes d'information (PMSI)! Je m'éloigne de plus en plus de ma fonction: réfléchir à notre action et prendre en charge les adolescents. La réflexion clinique est passée sous le rouleau compresseur de l'administratif. »
Des pratiques diverses
Isabelle Buchheit, chef de service d'un service d'accompagnement à la vie sociale dans le Rhône, estime rester proche du terrain et des usagers. « Mon équipe se compose de sept éducateurs pour soixante-cinq adultes handicapés à domicile qu'il faut accompagner. Je ne compte pas mon temps entre les contacts, le travail en réseau, la construction de projets, les rencontres avec les partenaires... »
Marie-Thérèse Voiret, chef de service éducatif dans un centre d'activités de jour et d'hébergement à Lyon reconnaît que « la gestion des plannings est lourde mais ne représente que 10 % de la charge de travail ». Elle a longuement assuré la fonction de chef de service dans un autre emploi sans en avoir ni le grade ni le salaire. Elle a postulé à cet emploi parce qu'elle adhérait à la politique du directeur. Mieux vaut alors que le tandem directeur-chef de service fonctionne harmonieusement...
Patricia Trungel-Legay le confirme: « Le mot qui représente le mieux ma fonction auprès du directeur est loyauté. Je me considère comme un médiateur entre la direction et l'équipe d'éducateurs. C'est un maillon important: si la communication interne va, le reste suit. » Bien sûr, les pratiques varient. Les délégations accordées au chef de service peuvent être étendues ou complètement restreintes. Certains n'ont même pas la maîtrise du budget de leur unité, d'autres doivent justifier de leurs horaires. D'autres encore représentent très aisément le directeur auprès des partenaires. Lequel est, lui aussi, est un intermédiaire entre son employeur, une association, ou une collectivité territoriale et l'équipe de professionnels.
Perspectives de formation
Alors, quel avenir pour ces chefs de service? « J'ai choisi ce poste, non pour le pouvoir, mais pour défendre les valeurs du métier. L'avenir? La réalisation de projets avec, pour l'étayer, la formation au certificat d'aptitude aux fonctions d'encadrement et de responsable d'unité d'intervention sociale (Caferuis). Un poste de direction? Trop éloigné du terrain », répond Patricia Trungel-Legay. « Il me faudrait des connaissances dans la gestion budgétaire », souhaite Marie Thérèse Voiret « et puis, pourquoi pas, le certificat d'aptitude aux fonctions de directeur d'établissement (Cafdes)? » Elle peut y réfléchir: son directeur sera bientôt amené à quitter le site pour d'autres fonctions.
Brigitte Bertin
Les six domaines d'activité du chef de service éducatif
•le pilotage de l'action
•l'encadrement de l'équipe éducative
•la gestion administrative et budgétaire
•l'information et la communication
•le projet d'établissement
•le partenariat et le travail en réseau
Source: association des chefs de services éducatifs et autres cadres intermédiaires du secteur social et médico-social Rhône alpes. Site: http://acse.ra.free.fr.