Tout étranger qui souhaite travailler en France doit apporter la preuve qu'il a suivi au moins trois ans d'études post-secondaires, obtenu le diplôme d'assistant social dans son pays d'origine (reconnu par le ministère des Affaires sociales) et, parfois, y ajouter quelques années d'expérience professionnelle, maîtriser la langue française et résider sur le territoire national. Une distinction s'établit ensuite entre ressortissants de l'Union européenne, et ceux qui sont originaires de Suisse, d'Islande, de Norvège, du Liechtenstein.
Pas si facile
Les premiers, une fois la demande d'attestation de capacité à exercer déposée auprès du ministère, doivent compter quatre mois pour obtenir une réponse. En fonction du programme des études suivies, cette dernière pourra d'emblée être positive ou ne sera délivrée qu'à la suite de la validation d'un stage d'adaptation ou après avoir réussi une épreuve d'aptitude (au choix du candidat). Pour les seconds, le transfert des compétences obtenues à l'étranger doit se faire via certaines directions régionales des affaires sanitaires et sociales (Drass). Si la réponse est positive, elle fixe, dans les deux mois, l'obligation de suivre le stage d'aptitude de sept mois, à l'issue duquel le diplôme d'Etat est délivré. Quand la réponse est négative, c'est souvent par manque d'équivalence dans les domaines de compétences.
Les centres de formation préparant le diplôme d'Etat accueillent les plus chanceux pour assurer leur préparation à la certification et garantissent une bonne maîtrise de la langue française orale et écrite.
Sur le papier, le parcours paraît simple, dans la réalité, il l'est beaucoup moins. Il suffit que manque un document - état civil, copie des diplômes, détails des programmes étudiés... le tout traduit en français -, pour que les délais d'obtention de la reconnaissance s'allongent. Entre la fin des études à l'étranger et la possibilité d'effectuer le stage d'adaptation en France, il peut s'écouler une année scolaire. Plus une autre pour la réalisation du stage. « L'administration française est pointilleuse, mais la profession en sort préservée », remarque Marie-Hélène Colson, formatrice à l'Institut supérieur social de Mulhouse.
Ce sont souvent les étudiants européens frontaliers qui sont intéressés par un emploi en France. Leur formation, délivrée par l'université, débouche rarement sur un travail dans leur pays. « Après avoir obtenu l'attestation de capacité à exercer, j'ai postulé à un emploi le vendredi : je commençai le lundi suivant », se souvient Sonia Rodriguez, Espagnole venue effectuer ses stages avec le programme Erasmus, en France. « Si j'étais employeur, je recruterais certains assistants sociaux étrangers pour leur sensibilité au travail social communautaire », poursuit Marie-Hélène Colson.
Des histoires complexes
« Ce sont toujours des histoires complexes que nous vivons avec les personnes en demande de reconnaissance de diplôme. Et puis cela dépend de leur pays d'origine. Rwandais ou Roumains, les employeurs n'ont pas le même regard », raconte Anne-Marie Carrette, responsable de la formation adaptation à l'institut social Vauban de Lille. « Je suis très favorable à la dimension européenne du travail social. La diversité des pratiques permet de construire une Europe sociale », souligne Jean Louis Patrick Chiniard, directeur de l'association Olga Spitzer dans les Hauts-de-Seine.
La formation reçue par Anna Maria Bargans en Colombie a duré quatre ans, dont deux passés en stages. Au programme: psychologie, sociologie, mathématiques, logique, philosophie... « Ici, vous avez tous les moyens qu'il faut pour aider les usagers mais il n'y a aucune action collective. Exemple : dans l'association où je travaille, nous sommes mal encadrés. Je cours d'un service à l'autre pour remplacer des gens malades. C'est difficile de travailler sérieusement. »
A savoir. Pour ceux qui ne parviennent pas obtenir le diplôme d'Etat français, malgré leurs compétences avérées, il y a une solution négociable avec certains employeurs: se faire embaucher en qualité de chargé de mission.
Brigitte Bertin
Point de vue
Vicente Montalban Aroca, assistant de service social à l'association Althair (92)
« En Espagne, la formation pratique est beaucoup plus légère qu'en France. Dans l'exercice de ma profession, ici, je ne trouve pas l'encadrement nécessaire. Que ce soit dans les associations ou dans la fonction publique, les professionnels sont livrés à eux-mêmes, ce qui entraîne des dérives préjudiciables aux usagers qui, à mon avis, ne sont pas respectés. De plus, il n'y a aucune action collective, l'analyse est trop individualiste. »