Dans le répertoire des métiers de la fonction publique hospitalière, le masseur-kinésithérapeute rééducateur est celui dont la mission est d'« évaluer les capacités motrices, sensitives, sensorielles et cognitives d'une personne; de mesurer son niveau de performance et d'autonomie et de déterminer la nature et l'étendue des déficiences anatomiques et fonctionnelles, analyser leurs interactions, poser un diagnostic kinésithérapique et formuler des objectifs de soins. »
Pour les directeurs d'établissements et de services du secteur, il est surtout un professionnel paramédical difficile à recruter et à fidéliser. Les chiffres parlent d'eux-mêmes. On compte environ 64000 kinésithérapeutes en France et à peine 20 % sont salariés, que ce soit à l'hôpital, dans des établissements privés participant au service public hospitalier ou non, dans des centres de soins ou des structures accueillant des personnes handicapées.
En cause, le faible montant des salaires proposés au regard de leur formation, qui, en comptant une année préparatoire, dure généralement quatre ans. De 1400 nets par mois environ en début de carrière, à 2300 en fin, selon les grilles de la convention collective de 1951.
Établir une convention
Du coup, bon nombre de jeunes diplômés préfèrent entamer une carrière libérale dès la fin de leurs études. Ce dont ils ont la possibilité, contrairement à d'autres professionnels paramédicaux, comme les ergothérapeutes et les psychomotriciens. Et ce qui ne les empêche pas d'intervenir dans des structures médico-sociales, telles que les établissements pour personnes âgées dépendantes. Jean-Marie Grélard, kiné dans les Hauts-de-Seine, a ainsi choisi en 1991 de s'orienter vers la population grandissante des personnes âgées. Il intervient dans trois établissements à Levallois-Perret et se dit satisfait de ce travail sans bureau fixe.
Mais la question qui se pose alors est celle de la participation à la vie de l'établissement, aux réunions et aux projets, « suspendue à l'investissement personnel de l'intervenant », comme le note Nathalie Chassagnoux, directrice d'un foyer pour personnes handicapées mentales vieillissantes dans les Yvelines. D'où les astuces imaginées par un certain nombre de structures pour rester attractives.
À l'établissement public Saint-Antoine de l'Isle-sur-la-Sorgue (Vaucluse), qui comprend un institut médico-éducatif et un foyer d'accueil médicalisé pour les adultes traumatisés crâniens, la direction a pris la décision pour renforcer une équipe de deux titulaires, de passer une convention avec un kinésithérapeute libéral en se basant sur un volume d'actes, plutôt que d'établir un contrat à temps partiel.
Les hôpitaux de Puteaux (Hauts-de-Seine) et de Gonesse (Val-d'Oise), quant à eux, ont opté pour la souplesse en proposant aux kinés des horaires leur permettant de conserver une activité libérale à côté de leur poste salarié et en valorisant le travail d'équipe réalisé à l'hôpital. Le second a même mis en place un système d'accompagnement financier des études contre un engagement équivalent en temps de travail à l'hôpital. Et le centre de réadaptation cardiaque Léopold Bellan à Ollencourt (Oise) octroie, pour sa part, des points extra-conventionnels et une prime d'installation pour passer « d'un recrutement par défaut à un vrai choix dans les candidatures, dans une région où de surcroît, le seul institut de formation est national et forme donc peu de Picards pour son compte ».
Pluridisciplinarité
Par rapport à l'institution, les kinésithérapeutes, eux, évoquent l'intérêt d'un travail en équipe, souvent pluridisciplinaire. La possibilité de suivre une personne dans son parcours de vie, de faire de la prévention et aussi, parfois, de se former sur des pathologies particulières, comme cette kinésithérapeute qui a passé un diplôme spécialisé sur le traumatisme crânien. La création d'un ordre professionnel en 2004 et la publication en novembre dernier d'un code de déontologie ne devraient pas bousculer leur pratique, déjà encadrée par la structure dans laquelle ils exercent. Mais ils gardent un œil attentif sur les évolutions de leur profession.
Corinne Manoury
Point de vue
Alain Bergeau, président de la Fédération française des masseurs-kinésithérapeutes rééducateurs
« Les kinésithérapeutes ont longtemps été limités au curatif. S'il reste le cœur du métier, deux nouvelles orientations se dessinent. Il s'agit du préventif d'une part, avec, par exemple, les problèmes de dos ou les troubles musculo-squelettiques, et de la santé au sens large, avec une notion de bien-être qui se développe. Par ailleurs, il est important de décloisonner le médical et le médico-social. La tendance est à une sortie de plus en plus rapide de l'hôpital et au maintien à domicile des personnes âgées. Cela ne pourra se faire qu'avec un environnement médico-social fort. »