Les pédiatres sont les spécialistes de la santé des enfants de 0 à 18 ans. En France, ils sont 6 300, dont 2 600 exercent en libéral. Les autres occupent des postes dans les centres de Protection maternelle et infantile (PMI), les hôpitaux ou les établissements sociaux et médico-sociaux comme les instituts médico-éducatifs (IME) et les centres d'action médico-sociale précoce (CAMSP).
La route est longue pour devenir pédiatre. La formation dure dix ans, divisée en trois cycles. La première année du premier cycle des études de médecine (PCEM) est entièrement consacrée à la préparation du concours d'accès aux études médicales, permettant d'entrer en PCEM2. Puis, suit le deuxième cycle des études médicales (DCEM) sur quatre années. Enfin, le troisième cycle constitue la dernière étape conduisant à la qualification professionnelle. En pédiatrie, il se déroule sur quatre ans et est sanctionné par un diplôme d'études spécialisées (DES). Outre la formation théorique de 250 heures, il comporte plusieurs stages pratiques. Le candidat doit avoir validé au moins un stage semestriel en unité pédiatrique générale, en unité néonatologie et aux urgences.
Une pénurie criante
Le nombre de pédiatres formés, chaque année, ne suffit pas à couvrir les besoins. En 2009, l'Association française de pédiatrie ambulatoire (Afpa) lançait une pétition sous le titre : « Toujours plus d'enfants, toujours moins de pédiatres » pour dénoncer le faible numerus clausus (253 pour l'année universitaire 2009-2010) qui ne permet pas de compenser le nombre de départs annuels à la retraite de ces professionnels.
Outre ce déficit, l’insuffisance s’explique aussi par d’autres facteurs : l’augmentation de la demande en ville, en néonatalité, en PMI et du fait de contraintes liées à de nouvelles prises en charge tels que le handicap, la douleur, la génétique et le cancer…
Recrutement de non-spécialistes
Dans les établissements sociaux et médico-sociaux, la pénurie est encore plus criante. Les salaires des pédiatres (entre 1 900 et 3 740 euros bruts mensuels pour un débutant, puis environ 4 500 euros) y sont moins élevés que dans le libéral, eux-mêmes inférieurs de 10 à 20 % à ceux des médecins généralistes et 50 % au revenu moyen des spécialistes. « Il faudrait que les pédiatres de ville gagnent le Smic pour que le secteur social soit attractif, ironise Jean-Claude Bernadat, directeur du centre d'accueil d'urgence Saint-Vincent de Paul, à Paris. Notre pédiatre est un généraliste, car nous n'arrivons pas à trouver la perle rare ! Il assure le suivi médical de 75 enfants âgés de 0 à 18 ans. Sa principale mission est de conseiller la direction sur les problématiques médicales. Par exemple, donner un avis technique sur l'accueil d'un jeune qui sort d'un service de pédopsychiatrie. » Dans les établissements sociaux, la dimension médicale est de plus en plus importante. « Ce n'est pas notre cœur de métier, contrairement aux établissements médico-sociaux, mais l'état de santé de l'enfant redevient un élément essentiel de la prise en charge socio-éducative. On avait laissé cette dimension de côté depuis les années 1960 pour limiter la conception hygiéniste de la protection de l'enfance », renchérit Jean-Claude Bernadat.D'où un besoin important de personnel.
Pour faire face au manque de pédiatres, les structures sont généralement obligées de recruter des non-spécialistes, par exemple des généralistes, ou se partagent un pédiatre qui exerce par ailleurs en libéral.
Estelle Nouel
Point de vue
Dr Frédéric Armengaud, pédiatre dans un institut médico-éducatif à Nice (Alpes-Maritimes)
« J'ai été contacté par cet IME qui accueille 67 enfants présentant une déficience intellectuelle, au moment du départ à la retraite du pédiatre en place. Je suis salarié 3 heures et demie par semaine en plus de mon activité libérale. Mon rôle, en étroite collaboration avec le médecin psychiatre et l'infirmière puéricultrice, consiste à assurer le suivi médical des enfants, dont celui des vaccinations. Ils sont admis à l'IME après une première consultation. Puis, ils ont des visites régulières dont une annuelle en présence des parents.
Je suis également chargé de coordonner les différents bilans de santé à réaliser en consultation hospitalière ou chez le spécialiste qui les suit. Je supervise les menus de l'IME et forme le personnel avec l'aide d'une diététicienne. Enfin, je rédige les protocoles médicaux à mettre en œuvre dans l'établissement en cas de prise en charge urgente. »