Contrairement au statut de l’accueillant familial social, celui de l’accueillant familial thérapeutique (AFT) souffre encore d’un manque de cadrage. Résultat ? Les disparités entre les établissements gérant des services d’AFT sont importantes. C’est ce que pointe une enquête de 2009 (1) : celles-ci concernent la formation ou l’attribution du nombre de jours de congés annuels, et des pratiques très diverses. « À titre d’exemple, la rémunération des accueillants peut varier du simple au quadruple selon les établissements », souligne Virginie Vittu, attachée d’administration hospitalière à l’établissement public de santé mentale Lille-Métropole.
Pourtant, la fonction de l’AFT, qui héberge, chez lui ou en logement indépendant, une à deux (trois sur dérogation) personnes souffrant de troubles mentaux dans le cadre de placements (séquentiels, temporaires ou permanents), est primordiale. Sous le contrôle et la responsabilité d’un établissement ou d’un service de soins, son rôle est double : « Loger, nourrir, blanchir » les malades ayant souvent un lourd passé psychiatrique, mais aussi les accompagner au quotidien. Objectif ? Leur assurer un environnement stable et ainsi favoriser leur réinsertion.
À noter. Selon le statut de l’établissement – public ou privé – employeur, l’accueillant est salarié ou agent non titulaire (contractuel de droit public).
Par agrément spécifique
La fonction, qui ne requiert aucun diplôme, est subordonnée à l’obtention d’un agrément spécifique (valable cinq ans). Depuis la loi Hôpital, patients, santé et territoires (HPST) de juillet 2009, le directeur de la structure peut accorder ce sésame et statuer à la place du conseil général. L’agrément est délivré au terme de plusieurs vérifications menées sur le lieu d’hébergement. Outre le respect de règles générales d’hygiène et de salubrité, la mise à disposition d’une chambre individuelle d’au moins 9 m² présentant des conditions d’aération, d’éclairage et de chauffage satisfaisantes, l’équipe médico-psychologique mène une enquête sociale de quatre à six mois au sein de la famille accueillante.
La motivation et les qualités humaines des candidats sont déterminantes. Critère principal : l’aptitude à héberger des usagers qui ont connu de longues et difficiles périodes d’hospitalisation. Le profil idéal ? Une personne souple, à l’écoute, qui saura assurer la sécurité et le bien-être du malade et l’associer à ses activités quotidiennes. L’environnement familial compte aussi, car même si l’agrément n’est accordé qu’à une seule personne, le foyer doit être composé de deux personnes du sexe opposé. Un cadre de vie sécurisant, une situation financière stable sont autant de références prises en compte.
À noter. Dans le cadre de l’accueil de mineurs, l’agrément d’assistant familial remis par le conseil général est également exigé.
Formations initiale et continue
Deux types de contrats sont établis. Le contrat de travail, établi par le directeur de la structure, indique notamment le nombre de patients pouvant être accueillis et les conditions de la rémunération. Au minimum, l’accueillant doit percevoir un salaire journalier s’élevant à 2,5 fois le Smic horaire par personne accueillie auquel se greffent des indemnités couvrant les frais d’entretien et le loyer. Quant au contrat d’accueil nominatif, qui définit le projet thérapeutique, il est signé par le directeur, le psychiatre, les membres de la famille agréée et le malade (ou son représentant légal). Des visites au domicile sont régulièrement réalisées pour évaluer le bon déroulement du projet. De même, par des entretiens individuels, des groupes de parole…, le suivi de l’accueil et le lien avec le service AFT sont assurés par une équipe de soins pluridisciplinaire, sous la responsabilité d’un médecin psychiatre coordonnateur.
En l’absence de formation diplômante, les accueillants exerçant dans le cadre des AFT « adultes » peuvent bénéficier, dans des conditions variables, de formations initiale et continue. Ceux qui ont la charge de mineurs sont soumis à une obligation de formation de 60 heures préalable. Dans un délai de trois ans, les AFT doivent ensuite suivre une formation de 240 heures qui, à terme, leur permet de présenter le diplôme d’État d’assistant familial (DEAF), dont l’obtention assure un renouvellement automatique de l’agrément. Ce, sans limitation de durée.
(1) Enquête menée par l’Association des établissements gérant des secteurs de santé mentale, l'Institut de formation, de recherche et d'évaluation des pratiques médico-sociales et l’établissement public de santé mentale Lille-Métropole, avril 2009
Aurélie Raymond
Point de vue
Jean-Jacques Vauchel, psychologue et responsable de l’unité AFT adultes de l’hôpital Pierre Janet, au Havre (Seine-Maritime)
« Le service compte 13 familles accueillantes, essentiellement dans le cadre de séjours séquentiels, sous contrat avec l’hôpital. Les AFT jouent un rôle central dans le projet thérapeutique. En l’espace d’une dizaine d’années, 73 % des patients qui ont été suivis selon ce dispositif sont sortis de l’hôpital psychiatrique. Pour le recrutement, nous privilégions des personnes souples et dotées de fortes qualités humaines. Nous ne recherchons pas du tout des profils de soignants. Le protocole de suivi est très strict. L’équipe reçoit, dès la première semaine, les familles pour faire le point. Les infirmières se rendent régulièrement au domicile et, une à deux fois par an, nous organisons des réunions pour que les AFT échangent sur leur vécu. »
En savoir plus
Code de l’action sociale et des familles, articles L441-1 à L443-12
Loi n° 2009-879 (HPST) du 21 juillet 2009, article 92
Association des accueillants familiaux : www.famidac.fr
Publié dans le magazine Direction[s] N° 96 - juin 2012