Le métier de médiateur social dispose désormais d’un cadre de référence. Publiée fin 2016, la norme Afnor XP X60-600 « est le fruit du travail engagé pour la reconnaissance de cette profession qui a vu le jour dans les années 1980 et se structure depuis les années 2000, contextualise Laurent Giraud, directeur du réseau France Médiation. Dans une société de plus en plus clivée, il est en effet nécessaire de jeter des passerelles entre les mondes. »
Des intervenants sociaux
Une des premières définitions de la médiation sociale date de 2001. C’est « un processus de création et de réparation du lien social et de règlement des conflits de la vie quotidienne, dans lequel un tiers impartial et indépendant tente, à travers l’organisation d’échanges entre les personnes ou les institutions, de les aider à améliorer une relation ou de régler un conflit qui les oppose » [1]. La dénomination englobe la médiation sociale et culturelle, urbaine, interculturelle, les correspondants de nuit… Mais la fonction ne relève pas réglementairement du travail social. « Par rapport aux éducateurs, qui s’impliquent et proposent un accompagnement dans la durée, les médiateurs sociaux jouent le rôle d’interface et facilitent la recherche de solutions », explique Laurent Giraud. Ils interviennent dans l’espace public, les transports en commun, les écoles, les immeubles… Si leur présence est plutôt marginale dans les établissements et services sociaux et médico-sociaux, ils peuvent entretenir avec le secteur des liens forts quand ils ont affaire à des jeunes en difficulté, des « grands marginaux »…
Des profils très divers
La norme Afnor retient pour la profession deux principes directeurs : « aller vers » les gens, en particulier les plus isolés, ayant un accès limité à certains droits ou services et « faire avec » (et non « à la place de »), pour favoriser l’autonomie des personnes. En Isère, à l’Association pour la gestion des initiatives locales (Agil), la petite dizaine de médiateurs sociaux permanents « assurent une veille technique (dégradations…) et sociale (conflits de voisinage…), offrent une oreille attentive, aident à gérer les différends et passent le relais aux partenaires si besoin : missions locales, bailleurs sociaux, éducateurs de rue, services municipaux de prévention et de sécurité… Ce, en toute discrétion et confidentialité, » détaille Brigitte Gaud, référente d’équipe. « Il n’y a pas de parcours type, ajoute Sandra Fugier, directrice de l’association. Ils sont âgés de 26 à 60 ans, certains ont acquis des qualifications chez nous ; d’autres veulent s’orienter ensuite vers des fonctions de moniteur éducateur… Tous les candidats n’ont pas la formation ad hoc. Nous prêtons surtout attention à l’expérience professionnelle. »
Plusieurs diplômes attestent de compétences dans ce domaine, notamment au niveau « Bac » ou « infra-Bac ». Mais le métier ne figure pas dans les grilles des conventions collectives de l’intervention sociale ou de la fonction publique, et le recours aux contrats aidés est courant (contrats adultes-relais par exemple). Les médiateurs gagnent généralement entre 1500 et 1800 euros brut par mois en début de carrière.
[1] Charte de référence de la médiation sociale, Groupe de travail interministériel et interpartenarial sur les emplois dits de médiation sociale, octobre 2001, à télécharger sur http://i.ville.gouv.fr
Aurélia Descamps
« Mobiliser le pouvoir d’agir des habitants »
Jonathan Barnier, médiateur social à l’Association départementale pour la sauvegarde de l’enfant à l’adulte de la Vienne (Adsea 86)
« Éducateur spécialisé de formation, je suis depuis 2015 médiateur social dans deux quartiers prioritaires de la politique de la ville de Poitiers. L'approche territoriale (non par type de public) m’a attirée. Mais aussi le défi proposé : mobiliser le pouvoir d’agir des habitants, les amener à passer outre certaines différences générationnelles ou culturelles, sans être la personne qui résout les problèmes. J’aime créer ce lien, même si c’est particulièrement difficile en cas de conflits emprunts de racisme et d’intolérance. Mon regard porte au-delà du simple constat de nuisances (sonores par exemple), pour repérer les difficultés sous-jacentes (d’accès aux droits, de santé, d’emploi…) et solliciter les acteurs compétents (éducateurs, assistants sociaux, enseignants…). En plus du travail de rue et de la réponse aux saisines, nous menons des projets collectifs supports de médiation sociale, comme les Cafés des habitants, qui encouragent les échanges entre voisins, ou la médiation par les pairs en milieu scolaire. »
Publié dans le magazine Direction[s] N° 155 - juillet 2017