Céline Lembert, secrétaire nationale de l’Association nationale des assistants de service social (Anas)
C’est un des métiers emblématiques du travail social. Pourtant, il attire de moins en moins d’aspirants. En 2016, 7 800 étudiants étaient inscrits en formation d’assistant de service social (ASS), dont 2 500 en première année, soit une baisse de 7 % depuis 2006. Le nombre de candidats à l’admission a, quant à lui, chuté de 47 % en dix ans [1] !
L’assistant de service social intervient auprès de personnes, enfants ou adultes, confrontées à diverses difficultés (économiques, d’insertion, familiales, de santé, de logement) et les accompagne pour trouver des solutions. « Il doit soutenir la compréhension des dispositifs, favoriser l’accès au droit et contribuer à rendre l’individu citoyen », ajoute Céline Lembert, secrétaire nationale de l’Association nationale des assistants de service social (Anas). Près de 39 000 d’entre eux travaillent en France, dont la majorité (31 000) dans le secteur public (Éducation nationale, hôpital, collectivités territoriales, etc.), les autres professionnels se partageant entre le secteur privé, notamment associatif, et libéral, en développement même s’il reste encore marginal.
Trois années d’étude revalorisées
La profession, réglementée par le Code de l’action sociale et des familles (CASF), ne peut être exercée que par les titulaires – très majoritairement des femmes – du diplôme d’État (DEASS). Un précieux sésame qui s’obtient après trois années d’études alternant enseignement théorique et stages, et qui est passé du niveau III au niveau II et au grade licence dès cette rentrée 2018. « C’est enfin la reconnaissance de la durée réelle de notre formation qui va permettre la poursuite d’études en master, se félicite Céline Lembert. Mais cela ne règle pas la question des diplômé actuels qui conservent un niveau III et qui souhaiteraient obtenir le niveau II ».
Et du côté des nouveaux référentiels ? « Ils ne bouleversent pas la formation, même si les enseignements de la communication et du numérique, nouveaux, sont les bienvenus », commente Céline Lembert. « On observe quelques nouveautés, ajoute Didier Bryche, directeur pédagogique de l’école pratique de service social (EPSS), à Cergy (Val-d’Oise). Comme l’apprentissage obligatoire d’une langue étrangère, l’enseignement de l’impact du numérique sur l’accompagnement des personnes ou encore le développement de la capacité à agir sur un territoire donné ». Par ailleurs, les écoles de travail social, invitées à se rapprocher des universités, devraient être de plus en plus nombreuses à proposer des doubles cursus couplés à une licence disciplinaire (sociologie, sciences de l’éducation, etc.) permettant de continuer les études.
Une confusion des métiers ?
Un changement qui intervient alors que la profession est confrontée à des évolutions majeures. « La complexification des dispositifs et le développement du numérique, notamment, entraînent une augmentation de la charge de travail des assistants de service social, analyse Céline Lembert. Aujourd’hui, de nombreuses personnes, en difficulté avec l’informatique, viennent chercher de l’aide auprès de nous ». En outre, de plus en plus nombreux sont les employeurs du secteur associatif qui recrutent des « intervenants sociaux » en lieu et place des ASS, pour contrer la pénurie de professionnels formés ou s’acquitter de rémunérations moindres (les salaires des ASS varient, selon les conventions collectives, de 1 626 à 3108 euros brut en fin de carrière). « Cela créé une confusion et un préjudice pour les ASS, comme pour les usagers, qui n’ont pas toujours, face à eux, des personnes qui ont les compétences pour les accompagner », regrette Céline Lembert.
[1] «7 800 étudiants en formation d’assistant de service social en 2016 », Études et Résultats de la Drees n° 1044, décembre 2017.
Flore Mabilleau
Point de vue
Anne Jacquot, assistante de service social au service d’action éducative en milieu ouvert (AEMO), Sauvegarde du Val-d’Oise
« Nous sommes mandatés par le juge des enfants sur des situations de protection de l’enfance pour des mineurs en danger, qui ne nécessitent pas un placement mais une mesure éducative. En tant que référente éducative, ma première mission est d’apporter aide et conseils aux familles, mais j’ai également une mission de contrôle. Si des éléments nous inquiètent, nous en référons à la famille ainsi qu'au juge des enfants. Nous agissons en permanence dans l’intérêt de l’enfant, tout en cherchant l’adhésion des familles afin que la situation évolue favorablement. Exerçant à 80 % au sein de ce service d'AEMO, je dois suivre, en temps normal, 21 mineurs. J’effectue des entretiens individuels avec l’enfant ou avec la famille, des visites à domicile, des sorties, individuelles et collectives…, selon une feuille de route élaborée en commun, signée par le responsable d’équipe et par les parents ».
Références
Décret n° 2018-734 et arrêté du 22 août 2018 (socle commun de compétences et de connaissances des formations du travail social de niveau I)
Décret n° 2018-733 du 22 août 2018 (formation et diplômes)
Arrêté du 22 août 2018 sur le
DEASS
Publié dans le magazine Direction[s] N° 168 - octobre 2018