L’accompagnement à la parentalité est une mission essentielle du travail social. « Insufflée par les investissements et les feuilles de route établis par les départements et les caisses d'allocations familiales (CAF), la thématique "accompagnement" a aujourd’hui pris le pas sur le "soutien" à la parentalité, précise Nicolas Lauriot Dit Prévost, sociologue et formateur, entre autres, à l'École des parents et des éducateurs (EPE Formation). Un cadre moins normatif qui permet plus de bienveillance, mais qui impose de réelles facultés de discernement et de réactivité pour déterminer et traiter les problématiques en jeu. »
Six champs d’intervention
D’un point de vue institutionnel, cette mission désigne six dispositifs, répondant à différents objectifs : la valorisation des compétences parentales pour les réseaux d’écoute et d’appui aux parents (Reaap) et les lieux d’accueil enfants-parents (Laep) ; le renforcement des liens entre familles et école pour les contrats locaux d’accompagnement à la scolarité ; la prévention des ruptures du lien familial via la médiation familiale et les espaces de rencontre ; l’information des familles (points info familles). Mais en réalité, le champ de la fonction est encore plus vaste et transversal.
En effet, l’accompagnement à la parentalité n’est pas un métier en soi, mais plutôt une compétence, qui peut être portée par de nombreux professionnels de l’action médico-sociale : assistantes sociales, conseillères en économie sociale et familiale (CESF), juristes, psychologues, éducateurs spécialisés, conseillers conjugaux, médiateurs familiaux… Mais aussi par des intervenants dans de différentes structures, publiques ou associatives gravitant, de près ou de loin, autour de la parentalité : centres sociaux, protection maternelle et infantile (PMI), aide sociale à l’enfance (ASE), politique de la Ville, Éducation nationale, champ du handicap…
Les modalités d’action, multiples, consistent à proposer, dans un cadre bienveillant et sécurisant, des espaces d’écoute et de parole, des activités de soutien du lien parents-enfants, des leviers de convivialité et de socialisation et, face aux situations conflictuelles, des dispositifs de médiation. Ces derniers ont connu un essor constant depuis quelques temps. « La conscience collective des familles par rapport à la pertinence d’un accompagnement en cas de difficulté est aujourd’hui forte », estime Jean-Marc Beaudoin, médiateur familial à l’association Point de rencontre médiation familiale, à Châteauroux (Indre).
Des problématiques complexes
Autre évolution notoire : la diversification croissante des liens familiaux et de la conjugalité (augmentation des séparations, mariage pour tous, multiculturalisme, recompositions familiales…). Autant d’enjeux qui ont entraîné le développement de cursus en formation continue à l’attention des professionnels. « Au-delà des situations variées, l’accompagnant à la parentalité doit être en mesure d’interagir avec la famille et de répondre, le cas échéant, aux besoins immédiats des personnes en grande précarité psychosociale, explique Nicolas Lauriot Dit Prévost. Ce qui nécessite d’être outillé sur une cartographie des acteurs possibles de son territoire. »
Cette pluralité des profils va sans doute s'accroître à l’avenir. « Par crainte d’être jugés ou pénalisés, les parents en difficulté sollicitent parfois plus spontanément des professionnels dont la fonction dépasse celle de la famille et avec qui ils ont établi un lien de confiance, que des travailleurs sociaux », estime Emmanuel Gratton, responsable pédagogique du DU Accompagnement à la parentalité, proposé par l’université d’Angers (Maine-et-Loire).
Catherine Piraud-Rouet
Point de vue
Stéphanie Vautier, médiatrice familiale et directrice de l'association Impulsion 54, à Pont-à-Mousson (Meurthe-et-Moselle)
« Nous accompagnons les familles dans leur parentalité par la porte d’entrée de la médiation familiale. La question des enfants est au cœur de 99 % des situations de conflits, avec des conséquences sur la parentalité : problèmes de comportement, difficultés de communication, scolaires ou financières… Nous commençons par rencontrer les deux parents individuellement, pour permettre à chacun d’exposer son point de vue. Une fois identifiée la problématique en jeu, notre psychologue clinicien peut recevoir l’enfant et /ou les parents. Mais, officiant dans un cadre de prise en charge interdisciplinaire et de maillage de proximité, nous pouvons aussi réorienter la famille vers d’autres structures comme la Maison des Adolescents, les centres médico-psychologiques, les services sociaux, les thérapeutes familiaux, les pédiatres… Si l’enfant est en danger, nous pouvons mettre en place une information préoccupante ou un signalement. Nous nous appuyons également sur la médiation animale, avec un chien formé à la reconnaissance des émotions. »
Aller plus loin
- "Dessine-moi un parent", Stratégie nationale de soutien à la parentalité 2018-2022, Direction générale de la cohésion sociale, sur https://solidarites-sante.gouv.fr
- Circulaire DIF/DAS/DIV/DPM n° 99-153 du 9 mars 1999 relative aux Reaap
- Recommandations du Conseil de l’Europe relative aux politiques visant à soutenir une parentalité positive, décembre 2006, sur https://rm.coe.int/16805d6dc5
Publié dans le magazine Direction[s] N° 185 - avril 2020