« Cette loi obligera tous les directeurs à introduire le principe d’euthanasie dans leur structure ! Car c’est bien de cela qu’il s’agit, même si le chef de l’État a tenté d’édulcorer le processus en refusant d’utiliser le bon terme », assure Gaël Durel, vice-président de l’association des médecins coordonnateurs MCoor. Décidément, le projet de loi prévoyant une aide à mourir, attendu en conseil des ministres en avril, passe mal chez nombre de soignants. Le principe ? Pourront demander à y accéder – y compris à domicile et en Ehpad – les majeurs atteints d’une maladie incurable et au pronostic vital engagé “à court ou moyen terme”, a détaillé mi-mars le chef de l’État. Endurant des souffrances réfractaires, ceux-ci devront aussi être capables de discernement “plein et entier”. Excluant ainsi de nombreux résidents d’Ehpad… du moins en attendant les modifications qui interviendront au Parlement, craint déjà Mcoor.
Bien mourir versus bien vieillir
Le texte devrait en outre “remettre les soins palliatifs au cœur de l’accompagnement”, via la stratégie décennale qui était annoncée pour la fin mars. À la clé ? Un milliard d’euros supplémentaire sur dix ans. « Soit une augmentation des crédits de 6 % par an, là où les projections montrent que, vu le vieillissement de la population, 10 à 15 % sont nécessaires pour maintenir le niveau d’accompagnement ! rapporte Gaël Durel. Une aide à “bien mourir” devrait d’abord consister en une aide à “bien vivre jusqu’au bout”, en nous donnant les moyens pour cela. Or nous sommes, selon les Ehpad, à un ratio de 0,4 à 0,6 ETP par résident, là où la Défenseure des droits a récemment prévenu qu’il était illusoire d’espérer faire de la qualité en deçà de 0,8. » Dans toutes les têtes ? Le retard pris dans le projet de loi Grand âge qui, « une fois de plus, semble à l’arrêt », alerte la fédération de directeurs Fnadepa. Qui prévient : « Cette aide à mourir ne peut pas être la seule réponse de l’État face à la vague démographique qui s’annonce. »
Gladys Lepasteur
Publié dans le magazine Direction[s] N° 229 - avril 2024