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Droit du travail
Comité social et économique : fonctionnement et moyens

21/02/2018

Après l’exposé des règles de mise en place et des attributions du comité social et économique (CSE) dans le précédent numéro, place à ses modalités de fonctionnement et aux moyens alloués à cette nouvelle et unique instance représentative du personnel.

D’ici au 1er janvier 2020, le comité social et économique (CSE) se substituera notamment aux délégués du personnel (DP), au comité d’entreprise (CE) et au comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT). Le 14 février dernier, les ordonnances « Macron » ont été ratifiées – et modifiées – par un ultime vote du Sénat. La saisine du Conseil constitutionnel ayant été annoncée, ce n’est qu’après sa décision que la loi de ratification pourra être publiée et que les textes acquerront définitivement force de loi.

1 Statut des membres de l'instance

Combien d’élus ?

Conséquence de la fusion des instances : la nette diminution du nombre d’élus, lequel peut toutefois être augmenté dans le cadre du protocole d’accord préélectoral (PAP). Le nombre de titulaires et de suppléants, fonction des effectifs de l’entreprise [1], varie entre un (moins de 25 salariés) et 35 (au moins 10 000 salariés). Concernant la représentation syndicale, c’est le statu quo : dans les entreprises de 50 salariés et plus, chaque syndicat représentatif peut désigner un représentant au CSE, qui est de droit le délégué syndical (DS) dans les entreprises de moins de 300 salariés.

Le mandat

La délégation du personnel au CSE est en principe élue pour quatre ans. Par dérogation, un accord collectif de branche, de groupe ou d’entreprise peut fixer une durée du mandat comprise entre deux et quatre ans. Nouveauté, les membres du CSE ne pourront pas exercer plus de trois mandats successifs, sauf dans les entreprises de moins de 50 salariés (afin de palier le risque d’insuffisance de candidats) ou si le PAP en dispose autrement (faculté ouverte uniquement dans les entreprises de moins de 300 salariés). Les autres règles relatives aux mandats (cessation, suppléance…) sont une simple transposition des règles régissant le CE et les DP.

Les formations

Sous réserve de quelques aménagements, la réforme reprend les formations prévues pour les membres du CE et du CHSCT :

  • dans les entreprises d'au moins 50 salariés, les titulaires bénéficient d'un stage de formation économique ;
  • que l’entreprise atteigne ou non 50 salariés, tous les membres du CSE – y compris les suppléants – bénéficient de la formation en matière de santé, sécurité et de conditions de travail (SSCT).

Ces sessions, effectuées sur le temps de travail et rémunérées comme tel (sans déduction des heures de délégation), sont renouvelées après quatre ans de mandat, consécutifs ou non.

2 Fonctionnement : commissions et réunions

L'organisation interne

Dans les entreprises d’au moins 50 salariés, l’organisation au sein du CSE est globalement calquée sur le CE : désignation d’un secrétaire et d’un trésorier parmi les titulaires et élaboration d’un règlement intérieur… En dessous de 50 salariés, le comité n’a pas la personnalité civile (ce qui lui interdit d’agir en justice), ne dispose pas de budget, ni de règlement intérieur, de secrétaire ou de trésorier.

La commission SSCT (CSSCT)

La disparition du CHSCT est partiellement compensée par la création d’une commission, au sein du CSE, chargée de traiter des questions de santé, de sécurité et de conditions de travail (CSSCT), à l’exception des attributions consultatives du comité en la matière et du pouvoir de recourir à un expert.
Si sa mise en place n’est obligatoire que dans les entreprises et établissements distincts d’au moins 300 salariés, l’inspecteur du travail peut l’imposer s’il l’estime nécessaire. Hormis ces impératifs, le nombre et le périmètre de mise en place des CSSCT peuvent également être fixés par accord déterminant ceux des établissements distincts, ou par l’accord entre l’employeur et le CSE (en l’absence de DS uniquement), ou, à défaut d’accord, par l’employeur.
Quel que soit le cas de figure, en l’absence d’accord, c’est le règlement intérieur du CSE qui définit ses modalités de mise en place de la CSSCT (nombre de membres, missions…). Elle est composée :

  • de l'employeur ou de son représentant qui la préside, lequel peut se faire assister par des collaborateurs appartenant à l'entreprise (sans être en nombre supérieur à celui des élus titulaires),
  • et d'au moins trois représentants du personnel (dont un de la catégorie des cadres au minimum), désignés par le CSE.

Autres commissions

Un accord d’entreprise peut prévoir la création de commissions supplémentaires pour l’examen de sujets particuliers. En l’absence d’accord, ces commissions et leur seuil de mise en place correspondent à ce qui existe pour le CE.

Réunions

Dans les entreprises de moins de 50 salariés, les membres de la délégation du personnel du CSE sont reçus collectivement par l'employeur :

  • au moins une fois par mois ;
  • en cas d'urgence, à la demande des membres du comité (l’exigence de majorité n’est pas précisée) ;
  • sur leur demande également, soit individuellement, soit par catégorie, soit par atelier, service ou spécialité professionnelle (selon les questions qu'ils ont à traiter).

À partir de 50 salariés, un accord d’entreprise, ou en l’absence de délégué syndical, un accord entre l’employeur et le CSE peut définir le nombre de réunions annuelles, qui ne peut être inférieur à six. Au moins quatre doivent porter, en tout ou partie, sur les attributions SSCT du comité.

L’employeur doit également réunir le CSE :

  • pour une seconde réunion, s’ajoutant à celle périodique, à la demande de la majorité de ses membres ;
  • à la demande motivée de deux de ses membres, sur les sujets relevant de la santé, de la sécurité ou des conditions de travail ;
  • à la suite de tout accident ayant entraîné ou ayant pu entraîner des conséquences graves ;
  • en cas d'événement grave lié à l'activité, ayant porté atteinte (ou ayant pu porter atteinte) à la santé publique ou à l'environnement.

Quelques nouveautés à retenir :

  • le suppléant n’assiste aux réunions qu’en l’absence du titulaire qu’il remplace (ce qui devrait poser des questions pratiques, notamment pour la convocation et la communication de l’ordre du jour) ;
  • dans les entreprises de 50 salariés et plus, l’employeur est de droit assisté par trois collaborateurs ;
  • dans les entreprises de moins de 50 salariés, l'employeur a le droit d'être représenté ou assisté par des collaborateurs qui ne peuvent, ensemble, être en nombre supérieur à celui des représentants du personnel titulaires.

3 Moyens et financement du CSE

Crédit d’heures

Le nombre d’heures de délégation est substantiellement réduit [1]. Le protocole d’accord préélectoral peut modifier le volume des heures individuelles de délégation dès lors que leur volume global, au sein de chaque collège, est au moins égal à celui résultant des dispositions légales (ce qui entraîne une éventuelle  différence de traitement entre les collèges). Le principe du dépassement du crédit d’heures en cas de circonstances exceptionnelles reste maintenu.
Si les employeurs peuvent se réjouir de cette réduction du crédit d’heures, la réforme est en revanche loin d’en simplifier les modalités d’utilisation… Elles peuvent être employées cumulativement (et donc reportées) dans la limite de 12 mois, mais aussi être mutualisées entre titulaires et suppléants, sous réserve qu’un élu ne dispose pas, dans le mois, de plus d’une fois et demie son crédit d’heures. Celui-ci doit informer son employeur au moins huit jours avant la date prévue d’utilisation des heures cumulées ou réparties.

Expertises

Si les cas de recours aux expertises sont globalement identiques à ceux qui étaient ouverts au CE et au CHSCT, la réforme bouleverse les règles relatives à leurs frais. Qui sont désormais pris en charge :

  • intégralement par l'employeur pour les consultations sur la situation économique et financière de l'entreprise, sa politique sociale et les conditions de travail et l'emploi, les projets de licenciement collectif pour motif économique d'au moins dix salariés dans une même période de 30 jours, et en cas de risque grave constaté dans la structure ;
  • à hauteur de 20 % par le CSE, sur son budget de fonctionnement, et de 80 % par l'employeur, pour la consultation sur les orientations stratégiques et celles ponctuelles autres que les précitées (notamment en cas de projet important modifiant les conditions de santé, de sécurité ou les conditions de travail) ;
  • en totalité par le CSE pour ses expertises libres en vue de la préparation de ses travaux.

La crainte du recours systématique à l’expertise et de ses dérives (coût financier se répercutant sur les fonds propres…) est ainsi atténuée au profit d’une certaine rationalisation des coûts. Néanmoins, lorsque le budget de fonctionnement du CSE est insuffisant et n’a pas donné lieu à un excédent annuel au cours des trois dernières années, les expertises normalement cofinancées devront être intégralement payées par
l’employeur.
En outre, un accord d’entreprise, ou à défaut un accord conclu entre l’employeur et la majorité des titulaires du CSE, détermine désormais le nombre d’expertises dans le cadre des consultations récurrentes sur une ou plusieurs années.

Budgets du CSE

Le CSE dispose de deux budgets : fonctionnement et financement des activités sociales et culturelles (ASC). Désormais, les élus peuvent décider de transférer tout ou partie de l'excédent annuel du budget de fonctionnement aux ASC, et inversement (limité à 10 % dans ce second cas).

À noter. Dorénavant, l'affectation du reliquat des ASC vers le don aux associations est plafonnée à 10 % (au lieu de 1 % pour le CE).

[1] Code du travail, article R2314-1

Cécile Noël, juriste en droit du travail, Picard Avocats, membres du réseau ACC3S

Représentants de proximité, fantômes des DP ?

Les représentants de proximité peuvent être mis en place par l’accord fixant les établissements distincts, lequel doit définir leur nombre (membres du CSE ou salariés désignés par lui), leurs attributions, les modalités de leur désignation et de leur fonctionnement (crédit d’heures notamment). Si ces représentants sont souvent – à tort – assimilés aux délégués du personnel (DP), l’accord les instituant a toute latitude pour définir leurs droits, obligations et moyens. Au libre choix des négociateurs.

Crédit d’heures et temps de réunion : les miettes laissées par l’ordonnance « balai »

Le Code du travail [1] prévoit désormais que le temps passé « aux réunions du comité et de ses commissions, dans ce cas dans la limite d’une durée globale fixée par accord d’entreprise ou à défaut par décret en Conseil d’État » n’est pas déduit du crédit d’heures. Le décret du 29 décembre 2017 fixe cette limite à 30 heures par an dans les entreprises entre 300 et 1 000 salariés, et 60 heures au-delà. Mais comment lire cette disposition ? La limite annuelle s’applique-t-elle aux réunions obligatoires du CSE (ce qui restreindrait considérablement le temps passé en réunion avec l’employeur) ainsi qu’à celles de ses commissions, ou seulement à ces dernières ? Une clarification est donc attendue sur ce point.

[1] Code du travail, article L2315-11

Références

Ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017

Ordonnance n° 2017-1718 du 20 décembre 2017

Décret n° 2017-1819 du 29 décembre 2017

Projet de loi (définitivement adopté) ratifiant les ordonnances prises sur le fondement de la loi d’habilitation n° 2017-1340 du 15 septembre 2017

Publié dans le magazine Direction[s] N° 162 - mars 2018






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