Spécialistes du soutien à la parentalité, les techniciens (très majoritairement des techniciennes) de l’intervention sociale et familiale (TISF) aident à gérer l’ordinaire… mais aussi le plus essentiel. En partageant le ménage, les soins des enfants ou encore un pique-nique, elles soulagent des couples accueillant un nouveau-né, contribuent à renforcer ou à restaurer des liens familiaux ou encore à donner confiance à des parents en difficulté.
Des problèmes de recrutement
Les TISF interviennent essentiellement à domicile, dans le cadre des politiques publiques familiales (soutien pendant la grossesse, à la naissance, en cas de décès d’un enfant…) ou de l’aide sociale à l’enfance (ASE). « On est loin des travailleuses familiales des années 1950 ! Bien qu’elles soient aujourd’hui des travailleuses sociales, les TISF sont encore trop souvent considérées comme des aides-ménagères, y compris par quelques professionnels du secteur, regrette Gladys Bugeault, coordinatrice de la formation à l’Institut régional du travail social (IRTS) Poitou-Charentes. C’est un métier peu connu, en mal de reconnaissance. » Si bien que les employeurs (services d’aide aux familles fragiles, de l’ASE et, plus rarement, établissements sociaux) peinent à recruter. Aux dernières nouvelles – qui datent de 2008 ! – on comptait entre 7000 et 7500 TISF [1], mais les besoins seraient bien plus importants.
À noter. Les salaires s’élèvent à environ 1700 euros brut en début de carrière.
Les TISF exercent dans le cadre d’un projet d’aide construit avec la famille et en lien avec les institutions partenaires (conseil départemental, maternités…). Elles ont la particularité de conduire leur action dans la durée : une présence de quelques heures, plusieurs fois par semaine, pendant des mois, voire des années. « C’est un métier de terrain, au plus près des difficultés, qui use. Il permet de percevoir ce qui resterait sinon invisible : un frigidaire vide, un problème d’alcool, l’absence de repas de famille…, indique Olivier Herren, directeur général de l'association Adom’aide 68, à Mulhouse. Il y a de grandes responsabilités : le TISF peut être amené à faire un signalement à l’ASE, à réaliser des comptes-rendus d’observation qui seront parfois portés à la connaissance du juge des enfants. »
Au rythme des familles
Le diplôme d’État de TISF, de niveau IV (baccalauréat) s’obtient à l’issue d’une formation initiale de 18 à 24 mois. Il est également accessible par la validation des acquis de l’expérience (VAE) et en alternance. Des compétences techniques en rédaction d’écrits professionnels, en entretien de la maison ou encore en soin des nourrissons sont nécessaires. « Il faut une bonne capacité d’adaptation, ajoute Patricia Lartigue-Robert, responsable des ressources humaines à l’association Adiaf-Savarahm, à Villeurbanne. Car les publics relèvent de milieux sociaux et de cultures très différents. Et puis, on accompagne de plus en plus de parents avec des troubles psychiques, d’enfants handicapés. À nous de travailler au rythme des familles, sans penser ou faire à leur place. »
[1]« Étude sur les TISF : missions, compétences, modes d’intervention et image », cabinet Geste pour la DGCS, juin 2012
Aurélia Descamps
Point de vue
Évelyne Brunet, technicienne de l’intervention sociale et familiale de l'association Adomicile 49, à Angers
« Dans une même journée, on accompagne des publics très divers. Je peux, le matin, aider une mère seule, sans difficultés sociales particulières, à prendre soin de son bébé. Puis, encadrer une rencontre entre un enfant placé et son père, qui exerce son droit de visite ; avant d’aller soutenir, dans l’après-midi, un parent déficient intellectuel. On n’est pas toujours bien accueilli, par exemple quand on intervient sur décision du juge des enfants. Il faut alors s’apprivoiser mutuellement, gagner la confiance des parents, faire émerger leurs capacités. Pour y parvenir, j’essaie l’humour, je m’appuie sur les centres d’intérêts des personnes… Avec d’autres référents de l’association, nous organisons aussi des actions collectives : des ateliers (bricolage, cuisine…) ou des sorties (théâtre, journée à la mer…). C’est un métier passionnant. Il exige d’être solide psychologiquement : on doit sans cesse se remettre en question et certaines situations sont très violentes, mais il y a aussi de grands moments de joie. »
Publié dans le magazine Direction[s] N° 165 - juin 2018