L’épidémie de grippe saisonnière survient chaque année en France entre les mois de décembre et d’avril. « On compte environ 10 000 décès en moyenne par an. Il s'agit à plus de 90 % des personnes de 65 ans et plus », précise Sylvie Quelet, directrice de la prévention et de la promotion de la santé auprès de Santé publique France. D’où la nécessité d'un plan de prévention et d’action fondé sur trois piliers complémentaires : la vaccination, les mesures barrières et l’élaboration de protocoles d’action.
1 Une couverture vaccinale maximale
La vaccination reste la meilleure protection individuelle et collective pour les personnes fragilisées. Notamment dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), où un objectif de vaccination d’au moins 75 % des résidents est recommandé. « Il est conseillé de procéder à l'injection entre fin octobre et fin novembre, et avant le début de l’épidémie », informe Marie-Pierre Dufraisse, médecin et conseillère technique à l’Agence régionale de santé (ARS) Nouvelle-Aquitaine.
Pour convaincre d'éventuels réfractaires, une piqûre de rappel est parfois nécessaire. « Notre médecin coordonnateur signe une circulaire en septembre pour signaler à tous l’importance de se vacciner. Nous abordons la question avec les familles lors des visites, ainsi qu’en conseil de la vie sociale (CVS), témoigne Magali Bihac, directrice de l’Ehpad Les Jardins du Riveral, à Gignac (Hérault). Pour faciliter la vie des personnes, nous commandons nous-mêmes les doses de vaccins, et ceux-ci sont réalisés par notre personnel infirmier sur présentation d’un certificat de non-contre-indication du médecin traitant. »
La pédagogie est aussi de mise auprès des professionnels. « Au début de l’automne, une réunion d’information permet de leur rappeler les bienfaits de la vaccination, pour eux-mêmes et l’ensemble de la collectivité. En ciblant particulièrement les nouveaux embauchés et intérimaires », conseille Marie-Pierre Dufraisse. Toutefois, la vaccination demeure insuffisante. « D’une part, parce que les virus mutent tous les ans. D’autre part, car les personnes âgées et fragilisées ont des difficultés à fabriquer des anticorps contre les nouvelles souches », explique Sylvie Quelet.
2 Quelles mesures barrières ?
Un travail de sensibilisation est donc à mener auprès des personnels, des résidents et des visiteurs, afin de prôner l’application stricte des mesures barrières, ces gestes et comportements dès le premier signe d’infection afin de protéger l’entourage : lavage des mains, désinfection des espaces et des objets, partage restreint des effets personnels, couverture de la bouche en cas de toux avec un mouchoir à usage unique ou un masque… Et surtout, limitation des contacts avec les personnes potentiellement infectées. « En période épidémique, les établissements peuvent inviter les proches à reporter leurs visites et conseiller aux soignants atteints de rester chez eux. Le lavage des mains (à l’eau et au savon, avec des solutions hydroalcooliques) doit être renforcé, et l’utilisation des masques promue », pointe Sylvie Quelet.
3 Des protocoles à l’année
Ces actions doivent être doublées d'une prévention au long cours. D’abord, par une sensibilisation suivie des équipes aux risques infectieux, assurée par exemple par le médecin coordonnateur. Celui-ci met à jour les protocoles et organise des sessions d’information. Ensuite, par l’insertion de ces mesures dans le cadre du Plan bleu par exemple. Objectif ? « S’assurer que l’organisation demeurera opérationnelle même à flux tendu, préconise Magali Bihac. Mieux vaut planifier la réquisition du personnel, en prévoyant un pôle de remplacement ou via des partenariats avec des sociétés d’intérim par exemple. »
Catherine Piraud-Rouet
Faire face sereinement à l’épidémie en six conseils
- Dès le déclenchement de la période épidémique (plus de cinq cas d’infections respiratoires basses sur quatre jours), le déclarer auprès de l’ARS.
- Mettre les activités collectives en stand by.
- Mettre en place des mesures complémentaires dès la suspicion du virus.
- Isoler temporairement les résidents touchés dans leur chambre, en leur expliquant les raisons. S’ils refusent, négocier le port d’un masque et la limitation maximale du contact avec les autres personnes.
- Renforcer l’hygiène de base pour les équipes (masques, hygiène des mains, aération quotidienne de la chambre et des lieux de vie…), et nettoyer les locaux avec des produits virucides.
- Une demande de crédits non reconductibles auprès de l’ARS peut permettre de soutenir le recours à des renforts de professionnels, les mesures barrières, l’achat de tests rapides d'orientation diagnostique (Trod) ou encore la vaccination des professionnels.
Publié dans le magazine Direction[s] N° 168 - octobre 2018