Depuis le 18 mars, l’Adapei de la Sarthe convoque chaque jour une cellule de crise réunissant la présidence de l’association, la direction générale, celles des ressources humaines et du développement, ainsi qu’un médecin. Elle est élargie une fois par semaine aux directions de pôle afin « de faire remonter les problématiques des établissements », expose le directeur général Ludovic Husse. Réunion quotidienne également à l’ASEI : « A 9h avec la direction générale, puis à 15h avec les directeurs de bassin. Deux fois par semaine, je fais le point avec les cadres intermédiaires de mon équipe rapprochée », témoigne Adeline Leberche, directrice du bassin Ile-de-France de l’association.
Une division du travail claire
Décision stratégique, mise en œuvre opérationnelle, communication : au sein de ces instances, « la division du travail doit être très claire afin d’éviter la confusion des rôles, le travail pas cadencé et mal piloté », conseille Bertrand Parent, professeur à l’EHESP en management, communication et crise. Pour qui s’adosser à des personnes anticipant « le coup d’après, en parallèle de celles agissant dans l’urgence » est également indispensable.
A l’ASEI, un document centralise les ressources matérielles et humaines : « c’est très efficace pour le suivi en temps réel » soutient Adeline Leberche. Cette coordination est primordiale : il s’agit d’éviter d’« être chacun dans sa crise », insiste Bertrand Parent, défendant des moments où « les composantes de la cellule se mettent à niveau sur les réalisations en cours ». Privilégier une « unique porte d’entrée » des informations lui semble important.
Parler d’une seule voix
La coopération vaut aussi sur le plan relationnel : « il s’agit de mettre de côté les jeux de pouvoir, de rester solidaire, bienveillant ; et d’éviter les comportements agressifs », ajoute l’enseignant-chercheur. « La cellule de crise doit parler d’une seule voix », ajoute Ludovic Husse, insistant sur la confiance et la transparence à renforcer entre les acteurs.
La cellule de crise permet en outre de contribuer à la circulation d’informations claires, venant renforcer l’organisation managériale face à l’angoisse des équipes. Dans l’Ehpad qu’il dirige à Tremblay-en-France (Seine-Saint-Denis), Mustapha Boulemia constate la « peur des professionnels accentuée par le manque de matériel de protection ». En réponse, la direction « s’appuie sur les médecins coordonnateurs pour communiquer et rassurer ».
De nouveaux dispositifs peuvent également être mis en place à l’initiative de ces instances. Un psychologue a rejoint celle de l’Adapei 72 afin de lancer une cellule d’écoute pour les équipes. « Il ne faut pas que la cellule de crise s’isole, ni du terrain, ni des partenaires », confirme Bertrand Parent. Le management de proximité est à ses yeux la clé « pour relever les difficultés et construire collectivement des solutions locales ».
Capitaliser sur le travail effectué
Le fonctionnement en cellules de crise révèle « notre capacité, que peut-être nous ne soupçonnions pas, à nous mobiliser en un temps record », met en avant Adeline Leberche. En termes d’organisation, elles démontrent aussi « de nouvelles possibilités managériales et fonctionnelles : coopération entre établissements, transversalité accrue… » considère Ludovic Husse.
Il s’agira d’établir un bilan de la gestion de cette épidémie inédite. Pour se faire, Bertrand Parent préconise de « garder des traces objectives » du travail des cellules de crise : informations entrantes, communications sortantes, diagnostics, évaluations des actions… « À partir de là, il sera possible de capitaliser, et d’éventuellement revenir sur le dispositif de réponse ».
Maïa Courtois