Malheureusement sans surprise. Les réactions à la lecture des orientations de la campagne budgétaire 2012 des établissements et services médico-sociaux (ESMS) sont unanimes. Des arbitrages effectués sur la base d’un objectif national des dépenses d'assurance maladie (Ondam) médico-social qui parvient à tirer son épingle du jeu (+ 4 %), au regard de l’Ondam général (+ 2,5 %). Et pourtant…
Pour 2012, le taux d’évolution de la masse salariale est fixé à 0,8 %. « Avec un GVT de 0,95, les employeurs de l’aide à domicile n’ont plus aucune marge pour négocier, sans mettre à mal la pérennité de leur structure », déplore Hugues Vidor, directeur général de la fédération Adessadomicile (1). Pire : l’effet prix reste nul. Traduction ? Les taux de reconduction des moyens s’élèvent pour les secteurs des personnes âgées et du handicap respectivement à 0,712 % et à 0,6 %. « Cela conduit à une baisse des ressources budgétaires des associations, à euros et à périmètre constants, résume Philippe Calmette, directeur général de la Fédération nationale des associations gestionnaires au service des personnes handicapées (Fegapei). Dans les structures les plus fragiles, c’est d’abord l’emploi et la qualité de l’accompagnement qui en pâtiront. » « D’autant que sur le terrain, les établissements sont confrontés à la même logique de restriction de la part des conseils généraux », complète Murielle Jamot, en charge du médico-social à la Fédération hospitalière de France (FHF). Autre mauvaise nouvelle : 100 millions d’euros ont, une fois de plus, été mis en réserve. Le préalable à une nouvelle restitution de crédits à l’assurance maladie ?
Médicalisation
Dans le secteur des personnes âgées, l’année devrait être marquée par la reprise du conventionnement, suspendu l'an dernier. 140 millions d’euros ont été débloqués fin 2011. Quatre mois plus tard, les établissements n’en n’ont toujours pas vu la couleur, assure Alain Villez, conseiller technique à l'Union nationale interfédérale des œuvres et organismes privés sanitaires et sociaux (Uniopss). « La plupart des agences régionales de santé [ARS] n’ont pas bougé, alors qu’elles auraient dû amorcer le processus de médicalisation. » En outre, pour les structures non « pathossifiées », le dispositif de convergence tarifaire est assoupli. Dont acte, note le secteur qui en dénonce surtout la poursuite. « Pourquoi s’acharner à récupérer 15 millions d’euros, alors que dans le même temps près de 250 millions ne sont pas dépensés en faveur des personnes âgées ! (2) », s’indigne Didier Sapy, président de la Fédération nationale avenir et qualité de vie des personnes âgées (Fnaqpa).
Côté handicap, la poursuite du programme pluriannuel de créations de places 2008-2012 reste de mise. 42 % des objectifs initiaux étaient ainsi atteints fin 2010. Les consignes des pouvoirs publics sont claires : priorité aux nouvelles places en maisons d’accueil spécialisées – MAS (35 %) et en foyers d’accueil médicalisé – FAM (65 %). Des objectifs loin de convaincre : « De fait, le programme n’existe plus. La preuve ? En 2011, seules 470 places ont été créées dans le cadre des appels à projets ! En outre, avec la décision de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie de répartir la planification de l’allocation de ressources jusqu’en 2016, ce plan va en réalité s’étaler sur neuf ans ! », alerte Philippe Calmette. À retenir aussi au rang des priorités : les mesures encore d’actualité du plan Autisme 2008-2010 et le schéma national pour les handicaps rares.
Circulaire n° DGCS/5C/DSS/1A/2012/148 du 5 avril 2012
(1) GVT : glissement vieillesse technicité
(2) lire dans ce numéro, p. 8
Gladys Lepasteur
Une annexe controversée
Le diable se cache dans les détails, et parfois dans les annexes. L’Assemblée des départements de France (ADF) a déposé un recours contre la circulaire budgétaire. Et demande un texte rectificatif. En cause ? Des « libertés juridiques » prises, selon l’ADF, dans l’annexe 1. Notamment en matière d’imputation des frais d’évaluation externe dans les Ehpad et les FAM. « La LFSS pour 2012 permet le partage entre financeurs de ces frais, jusque-là supportés par la section hébergement, explique Jean-Pierre Hardy, chef des politiques sociales à l’ADF. Nous attendons le décret fixant les nouvelles règles de répartition. » Autre point litigieux : la « façon insidieuse » dont sont rappelées les règles de financement de la médicalisation des Ehpad, pourtant « devenues caduques ». « L’annexe propose même d’imputer au tarif hébergement les charges administratives effectuées par les médecins. Ce au moment où l'on martèle qu’il faut baisser le reste à charge ! », s’indigne ainsi l’Uniopss.
Publié dans le magazine Direction[s] N° 96 - juin 2012