« C’est un accord historique à un moment clé pour le domicile », a réagi Thierry d’Aboville, secrétaire général de l’union ADMR et membre de l’Union syndicale de la branche (USB-Domicile). La promesse de l’agrément d’ici à fin mai de l’avenant 43, faite le 1er avril
par la ministre déléguée chargée de l’Autonomie, Brigitte Bourguignon, met fin à quatre années d’intenses négociations. « C’est une vraie prise en compte de la paupérisation qui s’était installée dans le secteur », poursuit-il. Concrètement, cela entraînera, à partir du 1er octobre, une augmentation salariale de 13 à 15 % pour les 209 000 personnels des services d’aide et d’accompagnement à domicile (Saad) et de soins infirmiers à domicile (Ssiad) du privé non lucratif. Lesquels, selon l’USB-Domicile, assurent 75 % des prestations auprès des titulaires de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA). En s’appuyant sur le guide paritaire de la BAD, chaque employeur va déterminer l’augmentation (jusqu’à 300 euros), selon les métiers, les diplômes et l’ancienneté.
Côté financement, la contribution de l’État est affichée à 200 millions d’euros annuels, avec un surcoût pour les départements de 75 millions en 2021, compensé à 70 % via la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA). Soit un coût résiduel de 22 millions d’euros pour les exécutifs locaux. « Dès 2022, l’État s’engage à couvrir 50 % de la dépense supplémentaire, pour un montant de 150 millions d’euros », indique le ministère. Le coût global est estimé à 630 millions d’euros par an par les fédérations.
Colère des exclus
Mais l’Assemblée des départements de France (ADF) ne l’entend pas de cette oreille, faisant savoir que les besoins de financement pérennes s’annoncent bien plus importants. En outre, le moment, à l’aube des élections départementales de juin, est mal choisi pour les nouveaux exécutifs qui se verront imposer la mesure dans un contexte budgétaire contraint par la crise. L’ADF soutient aussi les représentants des secteurs lucratif et public, qui n’apprécient guère d’en être exclus car relevant d’une autre convention collective. Florence Arnaiz-Maumé, déléguée générale du syndicat Synerpa, dénonce ainsi une annonce « qui n’est pas réelle puisqu’elle n’est pas opérante, ni financièrement, ni même avec les professionnels », excluant 160 000 salariés. Elle défend la création d’un tarif horaire minimal de 23 euros dans chaque département, assorti d’un forfait assurance maladie de 3,50 euros. « Il ne faut pas comparer l’incomparable, le modèle des entreprises est différent. Nous n’avons pas de marges de manœuvre », réagit Thierry d’Aboville. Face à la tiédeur de l’ADF, il préfère saluer l’engagement du Morbihan et de la Loire sur le sujet. Et rappelle que l’avenant, qui devrait faire l’objet d’un décret à l’été, « sera opposable aux départements ».
Laetitia Delhon
« Pour sortir du statu quo »
Christian Gillet, président du conseil départemental du Maine-et-Loire
« Nous avons signé un contrat pluriannuel d’objectif et de moyens (CPOM) avec les quatre associations les plus importantes du département le 18 mars, sans attendre l’avenant 43, car l’autonomie des personnes à domicile est notre priorité. Or, nous manquons d’effectifs, en raison de la faible attractivité des métiers et d’une rémunération souvent inférieure au Smic. Ce CPOM nous engage pour cinq ans à hauteur de 2 millions d'euros par an, pour une revalorisation des salaires des intervenants de 10 % dès le 1er avril. Nous ne sommes pas un département très riche, mais nous ne pouvions plus rester dans le statu quo, alors que certaines interventions ne peuvent parfois pas être effectuées faute de personnel. Dès le 1er octobre, nous passerons à 15 % d’augmentation, conformément à l’avenant 43, quelque soit l’accompagnement de l’État. »
Publié dans le magazine Direction[s] N° 197 - mai 2021