Il avait annoncé la couleur : pas question d’annoncer une équipe resserrée pour ce premier gouvernement. 18 ministres, secondés par 16 ministres délégués, ont été nommés par le président de la République François Hollande, sur proposition du Premier ministre Jean-Marc Ayrault, le 16 mai dernier. Un choix qui accorde une large place aux élus, souvent sans expérience gouvernementale. Élément notable : avec 17 maroquins détenus par des femmes, la parité a été respectée. Strictement. Côté équilibres politiques, l’ancien premier secrétaire du parti présidentiel a, en outre, joué la carte de la synthèse et pratiqué à son tour une certaine… ouverture : deux écologistes font leur entrée au gouvernement, sans oublier la place de choix laissée aux radicaux de gauche avec la nomination de Christiane Taubira, qui obtient le fauteuil de garde des Sceaux. Parlementaire chevronnée au caractère bien trempé, celle-ci est décidée à revenir sur plusieurs mesure phares du gouvernement Fillon, notamment en matière de Protection judiciaire de la jeunesse. Autre arrivée, sans surprise cette fois : Marisol Touraine. Bien accueillie, la désignation de «Madame affaires sociales » au sein de l’équipe de campagne, s’est imposée comme une évidence. Avec elle, c’est le cumul des Affaires sociales et de la Santé qui signe son retour. Un bon présage ? Pour la seconder, pas moins de trois ministres déléguées. À noter : le dossier de la dépendance, terme préféré à celui d’autonomie, est confié à Michèle Delaunay, en charge des Personnes âgées. Un choix qui semble bien exclure le handicap de la réforme à venir, au grand dam du secteur. Plus globalement, le quatuor devra également concourir à la mise en œuvre du plan quinquennal de lutte contre la pauvreté et l’exclusion, fil rouge de l’action gouvernementale promis par le président alors candidat. D’autres postes-clés ont été confiés à des personnalités politiques rompues aux cabinets ministériels, comme Michel Sapin (au Travail) ou Marylise Lebranchu (à la Fonction publique notamment). Parmi les nouveaux portefeuilles, à signaler encore : celui de l’Économie sociale et solidaire, confié à Benoît Hamon. Toutes les promesses de campagne devront maintenant être confrontées au principe de réalité, que ne devrait pas manquer de rappeler le grand argentier de Bercy, Pierre Moscovici, à l’ensemble du nouveau gouvernement. Dont la composition ne sera définitive qu’à l’issue des élections législatives.
Gladys Lepasteur
Ministre des Affaires sociales et de la Santé
Marisol Touraine. Pas de surprise pour l’arrivée avenue de Ségur de cette spécialiste. Une double expérience acquise au parti socialiste (PS) comme secrétaire nationale chargée des questions de santé et de Sécurité sociale et membre de la commission des affaire sociales à l’Assemblée nationale. Principal dossier délicat pour l’ancienne responsable du pôle « social, santé, handicap, personnes âgées » dans l’équipe de campagne présidentielle ? Celui de la dépendance qui devrait être hissé au rang des priorités. Le vote d’une loi-cadre, financée par une nouvelle cotisation, pourrait intervenir en 2013. Mesures évoquées ? L’adaptation de 80 000 logements, un plan d’aide aux aidants et le doublement du plafond de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) pour les plus dépendants. Côté handicap, elle devra veiller à la prise en compte d’un volet spécifique dans chaque loi. La création d’une agence de l’accessibilité et un état des lieux national sont au programme afin de faciliter la mise en œuvre de l’échéance de 2015. À retenir également, la sécurisation de postes d’assistants de vie scolaire (AVS). Agrégée de sciences économiques et normalienne, Marisol Touraine est présidente du conseil général et députée d’Indre-et-Loire.
Ministre déléguée, chargée des Personnes handicapées
Marie-Arlette Carlotti
Ancienne députée européenne, elle est une élue locale confirmée. Conseillère générale des Bouches-du-Rhône depuis 1998, où elle a notamment été déléguée à la protection de l’enfance, elle a rejoint les bancs de la région en 2010.
Ministre déléguée, chargée des Personnes âgées et de la Dépendance
Michèle Delaunay
Conseillère générale de Bordeaux (élue en 2004, puis en 2011), cette ancienne cancérologue y fut, entre autres, présidente de la commission « personnes âgées, handicap, actions de santé ». Députée depuis 2007, elle est membre de la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale.
Ministre déléguée, chargée de la famille
Dominique Bertinotti
À 58 ans, cette historienne de profession, est maire du 4e arrondissement de Paris depuis 2001. Elle a notamment été membre du groupe en charge du projet présidentiel de François Hollande.
Garde des Sceaux, ministre de la Justice
Christiane Taubira
L’ancienne candidate à la présidentielle de 2002 est l’une des surprises. L’élue guyanaise (conseillère régionale et députée) est issue des rangs du parti radical de gauche. Pour le grand public, le nom de cette économiste reste attaché à la loi de 2001, reconnaissant l’esclavage et la traite des noirs comme crimes contre l’humanité. Elle devra mettre en œuvre nombre de promesses du président : renforcement de l’indépendance de la justice et abrogation de lois jugées sécuritaires (peines plancher, tribunal correctionnel pour mineurs…). Le nombre de centres éducatifs fermés (CEF) devrait, en outre, être doublé (pour atteindre 80 fin 2017). Elle pourra compter sur la députée des Deux-Sèvres, Delphine Batho, ministre déléguée à la Justice.
Ministre du Travail, de l’Emploi, de la Formation professionnelle et du Dialogue social
Michel Sapin
Il est incontestablement un homme d’expérience. Plusieurs fois député de l’Indre depuis 1981, l’ancien président de la commission des lois de l’Assemblée nationale a déjà assumé trois fonctions ministérielles (délégué à la Justice en 1991, Économie en 1992, Fonction publique de 2000 à 2002). Parmi les dossiers prioritaires du maire d’Argenton-sur-Creuse (Indre) ? La baisse du chômage (avec la création de 150 000 emplois d’avenir et de 500 000 contrats de génération) et la réforme du Smic, précédée d’un très espéré coup de pouce cet été. Sans oublier celle des retraites, dossier cogéré avec sa collègue Marisol Touraine. La méthode prônée ? La concertation avec les partenaires sociaux. Premier acte, dès juillet, lors de la conférence pour la croissance et l’emploi.
Ministre de la réforme de l’État, de la Décentralisation et de la Fonction publique
Marylise Lebranchu
Retour de l’ancienne secrétaire d’État aux petites et moyennes entreprises (1997), devenue ensuite garde des Sceaux de Lionel Jospin. Cette fois, elle hérite d’un portefeuille au périmètre XXL. Le nouvel acte de la décentralisation, à conduire en lien avec les collectivités territoriales, sera articulé avec le chantier de la réforme de l’État. Très attendue, la fin du mécanique non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux – symbole de la révision générale des politiques publiques (RGPP). 60 000 postes seront créés en cinq ans dans l’Éducation nationale. Ancienne maire de Morlaix (Côtes-d’Armor) depuis 1995, elle est également députée du Finistère depuis 1997.
Ministre délégué, chargé de l’Économie sociale et solidaire
Benoît Hamon
L’ancien porte-parole du PS endosse, pour la première fois, les habits de ministre (délégué). Député européen de 2004 à 2009, il est conseiller régional d’Ile-de-France depuis 2010. À son agenda ? Une future loi d’orientation et de programmation en faveur du développement de l’économie sociale et solidaire, une meilleure représentation des employeurs dans le dialogue social et le développement de l’insertion par l’activité économique (IAE). Aux côtés de Jérôme Cahuzac (chargé du Budget), il épaulera Pierre Moscovici, devenu ministre de l’Économie.
Ministre de l’Intérieur
Manuel Valls
« Il n’y aura ni angélisme, ni course effrénée aux chiffres », a promis le nouveau locataire de la place Beauvau. La nomination du médiatique député maire d’Évry (Essonne), qui a gagné ses galons au PS comme « Monsieur sécurité », n'est pas surprenante. Il est notamment attendu sur la politique migratoire. Il prend ses fonctions quelques mois après le lancement par son prédécesseur d’une réforme de l’asile très controversée. Promesse oblige, la nouvelle politique sera « inclusive ».
Ministre chargée de l’Égalité des territoires et du Logement
Cécile Duflot
L’entrée au gouvernement de la patronne d’Europe Écologie-les Verts était prévisible. Sur le bureau de cette urbaniste de profession : la politique du « Logement d’abord » ou encore le droit au logement opposable (Dalo). Au programme également, le lancement de nouvelles opérations de renouvellement urbain, complétées par des actions de cohésion sociale, en lien avec les associations. À ses côtés, le ministre délégué, chargé de la Ville, François Lamy.
Ministre des Sports, de la Jeunesse, de l'Éducation populaire et de la Vie associative
Valérie Fourneyron
C’est un médecin du sport, ancienne praticienne de CHU, qui accède à la tête de ce ministère. Ancienne conseillère générale de Seine-Maritime, elle est aujourd’hui députée-maire de Rouen. Parmi les pistes évoquées en faveur du monde associatif ? Une contractualisation accrue afin de consolider le financement pluriannuel ou encore un objectif de 100 000 jeunes en contrat de service civique.
Publié dans le magazine Direction[s] N° 97 - juillet 2012