« C’est une déclaration de guerre au secteur de l’hébergement », alerte Florent Gueguen, directeur général de la Fédération des acteurs de la solidarité. Motif de sa colère ? La volonté du gouvernement de déployer des équipes mobiles, constituées d’agents de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (Ofii) et des préfectures, dans les centres d’hébergement d’urgence afin d’examiner la situation administrative des personnes accueillies. Le gestionnaire de la structure étant prévenu 24 heures avant de la venue du binôme. La mesure, détaillée dans une circulaire interministérielle du 12 décembre, permet une orientation vers des dispositifs adaptés (dispositif national d’accueil, régularisation, proposition de retour…).
Question éthique
Aussi, le 8 décembre, une grande partie des associations (dont l'Uniopss, la Cimade…) conviées à la présentation de la mesure ont-elles claqué la porte. La jugeant contraire à l’accueil inconditionnel, car elle instaure « un contrôle généralisé et discriminatoire de personnes étrangères au sein de lieux privés ».
En outre, le dispositif obligerait les organisations « à transmettre les informations à caractère personnel préjudiciables » aux publics, posant « un problème éthique aux gestionnaires », relève Florent Gueguen. Des inquiétudes d’autant plus vives que cela « peut potentiellement mettre des dizaines de personnes à la rue », craint-il. Autre conséquence selon les associations ? Les familles n’appelleront plus le 115 pour être hébergées de peur d’être contrôlées et expulsées. Refusant de participer à ce que les organisations qualifient de « tri des personnes sans abri », elles en ont appelé au Défenseur des droits le 18 décembre. Une saisine qui porte également sur l’information du ministère de l’Intérieur organisant l'accueil des étrangers selon trois niveaux, fonctions de leur statut [1]. Et « détaillant les intentions répressives du gouvernement en matière de reconduite à la frontière ou de transferts des "dublinés", fustige Florent Gueguen. Le Défenseur des droits s'inquiète par ailleurs d’une proposition de loi, votée par les députés le 7 décembre en premier lecture, permettant de placer en centre de rétention administrative certains demandeurs d’asile soumis au règlement « Dublin » avant toute décision d’éloignement.
[1] Information du 4 décembre 2017 sur http://circulaires.legifrance.gouv.fr
Noémie Colomb
Publié dans le magazine Direction[s] N° 160 - janvier 2018