Les nouvelles mesures de revalorisation dans le champ du handicap sont-elles à la hauteur des difficultés du terrain ?
Dorothée Bedok. Nous nous félicitons qu’une partie de la branche associative sanitaire, sociale et médico-sociale à but non lucratif (Bass) ait été prise en compte, au même titre que le public. L’anticipation au 1er novembre des revalorisations pour les soignants, aides médico-psychologiques (AMP), auxiliaires de vie sociale (AVS) et accompagnants éducatifs et sociaux (AES) est bienvenue, tout comme le fait que le gouvernement s’engage à financer des mesures pour les professionnels des foyers et établissements à la charge des départements. Mais ces annonces ne résolvent pas l’ensemble des difficultés. Une bonne partie du champ reste nettement moins rémunérée. Par exemple, les centres d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) ou encore la protection de l’enfance où les besoins vont croissant. Depuis 2009, nous constatons une hausse des mesures de protection des mineurs de 12,1 % et de 13 % entre 2013 et 2018 pour les majeurs. Nous serons donc extrêmement vigilants à la prise en compte de l’ensemble des professionnels et notamment ceux du social dans le cadre de la Conférence des métiers annoncée pour janvier.
Cette conférence peut-elle être ambitieuse juste avant l’échéance électorale ?
D. B. Nous avons bon espoir d’un dialogue construit pour travailler posément sur les problématiques de notre secteur avec la mission lancée en parallèle par Denis Piveteau sur les besoins des établissements et services. Il va falloir aller vite ! Les pouvoirs publics doivent comprendre que le soutien d’une personne fragile passe bien par un accompagnement à la fois sanitaire, médico-social et social. On nous demande de créer des parcours de soin transversaux, mais il faut que nous puissions travailler sur ceux de ressources humaines qui vont avec, de même que sur la structuration de nos associations. Pour y parvenir, une équité de traitement des professionnels doit être garantie. Nous construisons l’environnement d’une convention collective unique, justement pour répondre à ces problématiques d’attractivité. Il est important que le gouvernement actuel s'engage sur les rémunérations pour mettre en œuvre les passerelles et les processus de formation qui maximisent la qualité de l’accompagnement et l’employabilité… Nous faisons notre travail d’employeurs. Il faut que nos financeurs, l’État et les conseils départementaux, nous accompagnent.
À la question de l’attractivité s’ajoute celle des surcoûts engendrés par la crise. Vous alertiez récemment avec d’autres organisations du grand âge sur la nécessité de prolonger le dispositif de compensation. Qu’en est-il ?
D. B. Non seulement nous n’avons pas eu de retour, mais les établissements n’ont pas encore eu tous les versements de la prise en charge (estimée à 70 %) précédemment annoncée. Nous avons aussi des pertes d’exploitation qui n’ont pas encore fait l’objet de compensation suffisante. Des Ehpad n’ont pas la trésorerie suffisante pour tenir et la situation devient assez urgente ! En outre, toute une partie des professionnels du grand âge n’ont pas encore été intégrés dans les revalorisations, comme ceux des résidences autonomie. Cela représente 30 000 équivalents temps plein (ETP). Encore un sujet que nous porterons à la Conférence des métiers.
Laura Taillandier
Publié dans le magazine Direction[s] N° 203 - décembre 2021