Concrètement, quels sujets vous attendent ?
Pascal Brice. Il s’agira d’abord d’aboutir à un diagnostic partagé de ce que vivent les personnes à la rue et en hébergement, comme des besoins en logements. Il nous faudra aussi envisager comment obtenir dans la durée un nombre suffisant de places au regard de ces données et garantir l’accompagnement social. Les relations entre l’État et les associations devront aussi être interrogées, tout comme les objectifs à atteindre en termes de logements sociaux et très sociaux. Des thèmes auxquels il faut ajouter, même s’ils dépassent le périmètre du ministère du Logement, la revalorisation du travail social et la capacité à sortir les personnes migrantes de l’hébergement généraliste. Cette programmation pluriannuelle correspond à la loi « De la rue à l’hébergement ou au logement » que nous avons proposée au gouvernement. Son ambition ? Acter définitivement un changement de culture dans les politiques de lutte contre la pauvreté et le sans-abrisme, en sortant de la gestion au thermomètre et en passant à une capacité d’action collective dans la durée. Ce, en prenant appui sur la récente décision gouvernementale de pérenniser les places à l’issue de la dernière trêve hivernale, mais aussi sur le constat, connu de longue date, que l’approche dans l’urgence ne permet pas de respecter la dignité des personnes.
Ces travaux seront finalisés au premier trimestre 2022. Ils n’engageront donc pas ce gouvernement…
P. B. C’est vrai, l’objectif est de disposer d’une norme de référence valable pour le prochain quinquennat. Nous comptons d’ailleurs interpeller les candidats à la présidentielle. D’ici là, les décisions prises devront être conformes à cette nouvelle approche. Dans le prochain budget, nous veillerons notamment au maintien des 200 000 places promises jusqu’au printemps 2022. Dans certaines régions, on voit déjà des tentatives de fermetures d’hôtels sans alternative. Et pour la suite, nous ne voyons pas aujourd’hui comment descendre en dessous de ce nombre sur l’ensemble de l’année 2022. Enfin, la question des financements et des prix de journée ne pourra être éludée, l’actuelle tendance à la baisse ne permettant pas d’assurer un accompagnement social indispensable.
Dans ce contexte, que vous inspire la reprise de la convergence tarifaire pour les centres d'hébergement (CHRS), suspendue en 2020 pour cause de Covid-19 [1] ?
P. B. C’est un signal contradictoire, la convergence n’étant pas conforme à la pluriannualité qui repose sur la réalité des besoins. Elle relève d’une logique d’un autre âge qui doit être abandonnée.
Même chose pour la contractualisation obligatoire ?
P. B. Nous sommes demandeurs d’une contractualisation loyale et équilibrée. Or, les contrats pluriannuels (CPOM) sont trop souvent des oukases. Nous devons nous accorder avec l’État sur une approche tarifaire intelligente et sur la capacité à mettre les financements face aux prestations attendues des associations, qui doivent ensuite rendre des comptes. D’ici là, nous avons obtenu le principe du report de l’échéance du 1er janvier 2023, pour lequel une traduction législative reste nécessaire.
[1] Arrêté du 24 août 2021
Propos recueillis par Gladys Lepasteur
Publié dans le magazine Direction[s] N° 201 - octobre 2021