Jean-Christophe Combe, ministre des Solidarités.
« Certains voudraient un grand soir du grand âge et une promesse à 17 milliards d’euros qui n’est ni crédible ni soucieuse des engagements financiers. Mon approche est de bons sens. » En ouverture des débats sur la proposition de loi Bien-vieillir, le ministre des Solidarités a défendu sa méthode, mi-avril à l'Assemblée nationale. Une réforme en trois temps, autour de quatre priorités : simplification de la vie de l’entourage des âgés, prévention de la perte d’autonomie, accessibilité de l’offre et lutte contre la maltraitance.
Une nouvelle gouvernance
Première étape ? Ce texte de loi qui, dans sa version en cours d'examen, acte une nouvelle gouvernance dans la lignée du rapport Libault [1] : une conférence nationale de l'autonomie, s’appuyant sur la caisse CNSA qui intégrera un centre de ressources chargé d’élaborer des référentiels d’actions. Sur les territoires, un service public départemental devra faciliter les démarches des personnes âgées, handicapées et des aidants et appuyer les professionnels dans l’élaboration de réponses adaptées. Pour en assurer la coordination, une conférence sera dirigée par le président du département, épaulé par le directeur général de l’agence régionale de santé, et déclinée sous la forme d’une commission des financeurs.
Parmi les autres nouveautés, l'obligation pour les Ehpad publics autonomes de coopérer dans le cadre d'un groupement territorial social et médico-social (GTSMS), comme le recommande l'Agence nationale d'appui à la performance [2]. Mais aussi la création d'une instance territoriale pour recueillir les situations de maltraitance, d'équipes locales sur les aides techniques, d'un comité d’éthique dans les structures...
Un plan d'action en juin
Seconde étape de la réforme ? Un plan d’action en juin qui comprendra notamment des mesures sur le reste à charge en Ehpad. Avant une dernière phase à l’automne avec le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2024. Si le ministre a promis des « actions interministérielles structurantes », nouvelle stratégie Aidants, plan de prévention des chutes à domicile, déploiement de MaPrimeAdapt, plan d’attractivité des métiers, la méthode « donne le sentiment de traiter un problème de fond avec des bouts de ficelles », regrette Jérôme Perrin, directeur du développement et de la qualité du réseau de services à la personne ADMR. S'il salue par ailleurs des avancées pour le domicile, comme une carte professionnelle, le soutien à la mobilité ou des réflexions annoncées sur le financement de l’offre, les moyens alloués à la réforme et la revalorisation des personnels restent les inconnues. Autre grief : le manque de concertation en amont, alors que les propositions des syndicats et fédérations pour une politique « ambitieuse » s'amoncellent sur le bureau du ministre. « Le PLFSS est un texte que l'on découvre au dernier moment et la difficile mise en application de la réforme des services autonomie, programmée à l'automne dernier, montre bien l'intérêt de penser les mesures avec le secteur. Sans compter le risque de cavaliers législatifs... », déplore Jérôme Perrin.
Quid du handicap ?
Un espoir : la loi de programmation pluriannuelle pour le grand âge, inscrite dans la proposition de loi à l'initiative de députés socialistes pour « plus de visibilité ». Reste que le handicap en est aujourd'hui écarté. Le Conseil de la CNSA a pourtant rappelé la nécessité de penser davantage la convergence des deux champs. Tout comme l'union nationale Uniopss qui défend toujours une grande loi Autonomie. « Il faudra être plus ambitieux » pour le secteur, résume l'association AD-PA.
[1] Vers un service public territorial de l'autonomie, mai 2022
[2] Renforcer le GCSMS pour accélérer l'évolution de l'offre, mars 2023
Laura Taillandier
Publié dans le magazine Direction[s] N° 219 - mai 2023