« La gestion de l’État insécurise les associations. » (N. Latour)
Peut mieux faire. Dans un rapport publié début octobre, la Cour des comptes dresse un constat critique des relations de l’État avec les gestionnaires de structures d’hébergement [1]. Alors que les budgets du secteur ont triplé en dix ans, atteignant 3,2 milliards d’euros en 2023, elle dénonce une politique conçue sur le mode de la « gestion d’urgences temporaires ». Parmi les écueils, le recours croissant à des pratiques de sous-évaluation et de gel de crédits. « L’État répond à des besoins structurels par des réponses de court terme et des outils conjoncturels, confirme Nathalie Latour, déléguée générale de la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS). Cette gestion, via des subventions annuelles, contribue à insécuriser les associations. La Cour s’aligne sur ce que nous demandons de longue date : des contractualisations pluriannuelles et une politique préventive de la rue au logement. » Le rapport recommande notamment de convertir une partie du parc d’urgence en places de structures sociales et médico-sociales pérennes, permettant ainsi, d’après la FAS, d’améliorer l’accompagnement tout en maîtrisant les coûts.
Une approche interministérielle
Autre alerte : le manque de contrôle des prestations. Une carence qui expose l’État à devoir intervenir en urgence en cas de défaillance d’un gestionnaire et le rend « captif » de certaines grosses associations. Enfin, le cloisonnement entre les parcs de droit commun et pour demandeurs d’asile est pointé. « L’hébergement d’urgence est lié aux défaillances des politiques migratoire, de logement, de protection de l’enfance, de santé… Une approche interministérielle est nécessaire », appuie Nathalie Latour.
« Nous sommes lucides sur les enjeux qui restent devant nous pour sécuriser notre modèle organisationnel, assure le délégué interministériel à l’hébergement Jérôme d’Harcourt. Notre action sur le pilotage […] vise à assurer une réponse immédiate à l’urgence, mais aussi à développer une action structurelle de long terme pour l’accès au logement avec l’orientation “Logement d'abord”. » La Cour note d’ailleurs qu’un dialogue est engagé avec les grands opérateurs et que des efforts sont menés pour renforcer les outils de pilotage, citant notamment le déploiement des services intégrés SIAO uniques.
[1] Les relations entre l’État et les gestionnaires de structures d’hébergement, sur www.ccomptes.fr
Margot Hemmerich
Publié dans le magazine Direction[s] N° 235 - novembre 2024