Catherine Vautrin, ministre du Travail, de la Santé et des Solidarités, au Sénat le 24 janvier.
Sur quelles dispositions s’accorderont les parlementaires lors de la commission mixte paritaire le 12 mars ? Les sénateurs ont sensiblement modifié la proposition de loi Bien-vieillir. En laissant la possibilité aux services de soins infirmiers Ssiad de ne pas se transformer en services autonomie à domicile (SAD), ils ont enterré la réforme engagée depuis deux ans, selon les fédérations d’employeurs.
Quel avenir pour les Ssiad ?
Sur le terrain, c’est plutôt un soulagement. « Enterrer la réforme n’est pas la solution, mais c’est un sujet complexe, concède Vincent Vincentelli de l’Union nationale de l’aide, des soins et des services à domicile (UNA). Les Ssiad ont des inquiétudes légitimes : certains reçoivent des fins de non-recevoir pour délivrer des prestations d’aide ou ne trouvent pas de partenaires assez solides. »
Autre sujet qui fâche sénatoriale ? L’expérimentation d’une tarification globale ou forfaitaire « alors qu’il est temps de généraliser une dotation unique », plaide Vincent Vincentelli. C’est d’ailleurs dans cette réforme que le responsable aurait voulu voir inscrire des temps d’échanges entre professionnels, alors que les sénateurs ont préféré l’allocation d’aides aux départements pour développer aussi des actions en faveur de la mobilité. Et si la délivrance d’une carte professionnelle est une reconnaissance nécessaire, « elle ne doit pas occulter les enjeux de rémunération et de qualité de vie au travail », estime Vincent Vincentelli.
Des groupements musclés
Côté Ehpad, tous les apports ne doivent pas être balayés, insiste la Fédération hospitalière de France (FHF). « Le droit opposable à la prévention et à la détection des fragilités est un bond en avant. Il faut maintenant définir qui en est responsable », illustre Marc Bourquin, son conseiller stratégique. Tout comme l’obligation pour les Ehpad publics autonomes d’adhérer à un groupement territorial social et médico-social « ne règle pas les aspects fiscaux ». Marc Bourquin salue aussi la possibilité laissée aux établissements de s’organiser en matière d’accueil des animaux de compagnie ou de moduler le tarif hébergement en fonction des ressources des résidents. En revanche, le fait que les Ehpad lucratifs échappent à l’allocation d’une partie de leur bénéfice à l’amélioration de l’hébergement passe moins à la FHF…
Certaines mesures sont plus unanimes, comme le service public départemental de l’autonomie, dont la préfiguration est déjà enclenchée, ou la future loi de programmation, suspendue fin février à une décision du Conseil d’État. Elle n’empêchera pas de présenter un projet de loi sur le grand âge d’ici à la fin de l’année, a souligné la nouvelle ministre Catherine Vautrin. Ce qui « nécessite de lancer très vite le travail transpartisan… », lance Marc Bourquin en guise d’appel du pied.
[1] Lire Direction(s) n° 216, p. 4
Laura Taillandier
Rififi sur la nomination des directeurs
C’est la disposition qui fâche le secteur public : les présidents des conseils départementaux pourraient donner leur avis sur la nomination des directeurs d’Ehpad par l’agence régionale de santé. Hors de question pour le syndicat Syncass-CFDT après la récente transposition des emplois de directeurs de la protection de l’enfance à la territoriale [1]. Ce transfert « ne fait pas une politique publique : cela ne crée pas de moyens et n’améliore ni l’attractivité ni la qualité de prise en charge », avance-t-il. « Une grosse erreur qui va encore complexifier la gouvernance, renchérit Marc Bourquin, ironique. Selon l’argument de l’autorité financière alors, demain, les départements donneront un avis sur les nominations dans l’associatif ? »
Publié dans le magazine Direction[s] N° 228 - mars 2024