« Nous allons chiffrer l’impact économique et proposer un partage du coût », indique V. Wisnia-Weill (CNSA).
Dix MtCo2. Cette donnée ne vous dit peut-être rien mais il s’agit du bilan carbone de la branche Autonomie, exprimé en millions de tonnes en équivalent Co2. Soit 1,5 % de l’empreinte carbone de la France. Pour arriver à cette « estimation inédite », The Shift Project, think tank spécialiste de la transition énergétique, a travaillé un an en partenariat, notamment, avec la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA).
Agir... mais comment ?
Principaux vecteurs de pollution identifiés ? Les déplacements (27 %), l’alimentation (24 %) [1] et la consommation énergétique des bâtiments. Des émissions pour moitié du fait des Ehpad. En effet, ce sont les départements où le taux d’équipement en lits pour personnes âgées est le plus important, comme la Lozère et la Creuse, qui sont les plus émetteurs. Et avec le vieillissement de la population, ce bilan pourrait grimper de 40 % d’ici à 2050.
« Pour enclencher la planification écologique, nous avions besoin d’un jeu de leviers quantitatifs », explique Vanessa Wisnia-Weill, directrice du financement de l’offre de la CNSA. C’est chose faite. The Shift Project propose deux scénarios, avec ou sans virage domiciliaire, comprenant des leviers déclinés en fiches opérationnelles. On y retrouve l’utilisation de véhicules électriques légers, l’installation de panneaux photovoltaïques, l’usage de pompes à chaleur ou l’extension des conciliations médicamenteuses. Autant de pistes de bon sens qui nécessitent toutefois de sérieux financements. « D’ici à l’été, nous allons chiffrer l’impact économique et proposer un partage du coût entre État, départements et opérateurs, en vue du prochain budget de la Sécurité sociale », précise Vanessa Wisnia-Weill. La CNSA ouvre aussi une concertation avec les agences régionales de santé et les collectivités pour établir des feuilles de route territoriales et entend accompagner davantage les professionnels en lien avec l’Agence nationale de la performance (Anap).
Avec une telle démarche, le secteur sera-t-il au rendez-vous de 2050 en réduisant de 80 % ses émissions comme le stipule l’accord de Paris ? Non, selon le think tank, sauf à développer la recherche ou prévenir davantage la perte d’autonomie. Démotivant ? « Le secteur a les leviers à sa disposition pour arriver à une baisse de 70 % et avoir un impact significatif sur la décarbonation en France, nuance Mathis Egnell, chargé de programme Santé du Shift Project. C'est encourageant. »
[1] Lire Direction[s] n° 229, p. 22
Laura Taillandier
Publié dans le magazine Direction[s] N° 230 - mai 2024