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Convention collective nationale du 31 octobre 1951
Vers un ultime round sous haute tension

07/09/2011

Échec des négociations sur la révision de la convention collective nationale de 1951. Cet été, sa dénonciation partielle a été confirmée par la Fehap. Selon quelles modalités les prolongations se joueront-elles ? Suspense.

Il n'y aura finalement pas eu de miracle. Un an et demi de négociations, émaillées d'une quinzaine de commissions paritaires et quasi autant d'entrevues bilatérales, n'aura donc pas suffi. Les partenaires sociaux n'ont pu tomber d'accord sur les termes du projet d'avenant à la convention collective nationale du 31 octobre 1951 (CCN 51), proposé par la Fédération des établissements hospitaliers et d'aide à la personne privés non lucratifs (Fehap).
Le 18 juillet dernier, à l'expiration du délai de signature, aucune des organisations de salariés (FO, CGT, CFE-CGC, CFDT, CFTC) n'avait paraphé le texte. Réaction sans surprise de la Fehap, conformément au mandat reçu lors de son assemblée générale, en mars dernier : la dénonciation partielle de la CCN qui régit, depuis 60 ans, les relations entre quelque 300 000 salariés (1) et leurs employeurs.

Adaptation nécessaire

Concurrence croissante, moyens financiers limités, modifications réglementaires... C'est pour faire du texte conventionnel « un élément de réponse aux défis [qu'ils] doivent relever » que les 3 600 adhérents de la Fehap ont opté, en 2010, pour son adaptation. « Ce projet [...] a été dicté par [notre] volonté de répondre aux contraintes des établissements, en leur donnant les moyens de s'adapter à un environnement en mouvement », rappelait alors Yves-Jean Dupuis, son directeur général. Méthode retenue : la révision de multiples dispositions conventionnelles. Allocation de départ en retraite, promotion, éléments complémentaires de rémunération, complément technicité... Le projet patronal balayait large. Des propositions jugées d'emblée « régressives  », et reçues comme une « véritable provocation » par Viviane Debarges, négociatrice de la CGT. Avis partagé par le secrétaire général de la CFTC, Michel Rollo : « Cette révision rime avec une diminution des droits et des garanties collectives. Pas question d'entrer dans un processus qui enlève des acquis aux salariés. » Ambiance.

Casus belli

Parmi les points de crispation, l'évolution de la prime d'ancienneté. Plafonnée à 30 %, elle progresse actuellement de 1 % par an. « Notre proposition : 37 % au terme de 41 ans d'ancienneté, ainsi que de nouvelles modalités d'évolution », argumente Sylvie Amzaleg, directrice des relations du travail à la Fehap. Un leurre, selon Éric Deniset, secrétaire fédéral de FO : « Pour en bénéficier, le salarié devrait avoir une carrière continue, sans changer d'établissement, ni avoir de promotion ! Ces 37 % ne concerneraient presque personne. »
Mais c'est, sans nul doute, le point sur les jours fériés qui a déchaîné les passions. Selon les termes du projet, plus question de récupérer ceux coïncidant avec un jour de repos hebdomadaire. « Cela représenterait la perte de trois à quatre journées par an. Nous avons tenté d'obtenir, au moins, une compensation financière en échange. En vain », déplore Claude Dumur, négociateur de la CFE-CGC. Pour la CFTC, il est exclu d'en discuter : « Le retrait de cette proposition était un préalable à toute avancée, raconte Michel Rollo, un symbole pour des salariés aux conditions de travail difficiles et au pouvoir d'achat en berne. » Et d'égrener : réforme des retraites, augmentation du coût de la vie, stagnation de la valeur du point... Le contexte social a naturellement pesé dans les discussions.
« Tous les partenaires sont restés à la table des négociations jusqu'au bout », se félicite pourtant Sylvie Amzaleg. Une ténacité qui, aux dires de certains syndicats, a permis quelques progrès - sur la question de la promotion ou sur celle de l'indemnité de remplacement... Pas suffisant, toutefois, pour empêcher la constitution d'un véritable front syndical du refus. Rejoint, in fine, par la CFDT, le 12 juillet. « Nous avons d'emblée affiché notre volonté d'aboutir, souligne, amère, Claudine Villain, secrétaire nationale. Mais aucune de nos propositions n'a été reprise. » Unanimes, les syndicats dénoncent la logique comptable sous-jacente. « La volonté est de réduire le coût de la masse salariale pour faire face aux problèmes budgétaires des établissements », reprend la CFDT. Faux, rappelait déjà en mars le président de la commission CCN 51 à la Fehap, Jean-Louis Garcia : « Notre mandat n'est pas la réduction des salaires, mais de réorganiser la redistribution de l'enveloppe salariale, de donner plus de souplesse et de responsabilité à la gestion de terrain, à masse constante. » Dégager des marges de manœuvre pour mieux les redistribuer aux personnels ? Scepticisme à peine voilé de Claude Dumur ( CFE-CGC) : « Si les établissements parviennent à dégager des économies, cela servira d'abord à réduire leurs déficits. Depuis 1999, les salaires réels dans le secteur ne cessent de baisser : si cela avait dû sauver les structures, ça se saurait ! » Et Éric Deniset (FO) de décrypter : « La Fehap cherche à faire payer aux salariés les difficultés de quelques établissements, notamment sanitaires, confrontés aux conséquences néfastes de la tarification à l'activité [T2A]. C'est pour les soutenir que tout le médico-social devrait payer la facture. »

Situations inextricables

La dénonciation partielle est donc confirmée. Mais de nombreuses questions sont encore sans réponse : selon quelles modalités ? quel calendrier ? quels articles sont-ils menacés d'être déconventionnés ? « Nos avocats y travaillent », répondait-on, cet été, du côté de la Fehap.
Une fois la dénonciation notifiée, débutera un... nouveau cycle de négociations de 15 mois, pendant lesquels la convention continuera à s'appliquer. Plus de 60 semaines, où la pression devrait être maximale, tant un nouvel échec s'avérerait lourd de conséquences, explique l'avocat Laurent Cocquebert : « Pour la Fehap d'abord, qui n'a aucun intérêt à ce que les avantages individuels acquis par les salariés s'intègrent à leur contrat de travail, comme le prévoit la loi dans pareil cas. Pour les syndicats ensuite, pour qui cela signifierait le retour aux dispositions du Code du travail, synonyme de régression sociale. Chaque partie s'engage dans des négociations avec le fusil sur la tempe. » Avec, en prime, outre « des situations juridiques potentiellement inextricables à gérer, de la "casse sociale" probable dans les établissements », avertit l'avocat. « Certains directeurs, déjà confrontés à des difficultés de recrutement, sont contre cette révision susceptible de rendre la CCN moins attractive, assure Éric Deniset (FO). Pour eux comme pour les autres, qui ont toujours du mal à digérer les conséquences de la rénovation de 2002 [lire l'encadré], ce n'est pas le moment de mettre le feu aux structures... » Car, sur le terrain, les mobilisations locales se sont succédé ces derniers mois. Et ce n'est qu'un début, préviennent les syndicats.
Sale temps donc pour les négociations dans la branche associative sanitaire et sociale (3). Pour la Fehap, désormais à la tête du collège employeurs Unifed, le chantier semble intimement lié à celui d'une future convention collective unique (CCU), dont elle se veut moteur (4). Comme le rappelait, en mars, son président Antoine Dubout : « La mise en œuvre d'une CCU ne sera évidemment possible pour autant que nous aurons démontré notre capacité à adapter notre [propre] convention collective. » Dont acte. 

 

(1) Comprenant les salariés des
établissements Fehap et de ceux qui, sans être adhérents, ont basé leurs relations sociales sur la CCN 51 (Estimations DGT, déclarations annuelles de sociales fin 2008)
(2) Lire Direction(s) n° 83, p. 8
(3) Lire Direction(s) n° 82, p. 8
(2) Lire Direction(s) n° 83, p. 8

(3) Lire Direction(s) n° 82, p. 8

Gladys Lepasteur

Ancienneté : la fin du contentieux ?

C’est un caillou dans la chaussure des adhérents de la Fehap, placé là par la rénovation de la CCN 51 de 2002. Le sujet ? Le mode de calcul de l’ancienneté des personnels en fonction au 1er juillet 2003 (date d’entrée en vigueur de l’accord). Un différend qui a poussé des salariés à saisir la justice, occasionnant le paiement de rappels de salaires. En avril 2011, les parlementaires ont voté une disposition dans le cadre de la loi dite Warsmann, visant à valider les reclassements intervenus « sur la base de la position occupée sur
la grille indiciaire au 30 juin 2003 »
. Un cavalier législatif aussitôt censuré par le Conseil constitutionnel. Devant la recrudescence des contentieux, la fédération a soumis, le 27 juin, à ses partenaires une proposition d’avenant interprétatif. L’enjeu est de taille pour les employeurs : la facture pourrait atteindre les 200 millions d’euros.

Publié dans le magazine Direction[s] N° 88 - octobre 2011






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