Remise du rapport Combrexelle © Cyrus Cornut-Matignon
L’élargissement du champ de la négociation doit-il se faire au détriment du Code du travail ?
Jean-Denis Combrexelle. L’idée n’est pas d’en supprimer des pages, mais de permettre aux négociateurs, confrontés à un Code du travail construit par strates successives, d’y voir plus clair sur leur marge de manœuvre. L’objectif est de distinguer, dans un souci de clarification, les « compétences » dévolues à la loi et à la négociation collective : au Code, les grands principes du droit (assortis des dispositions supplétives) ; aux branches la définition des principales règles de leur secteur d’activité ; et aux entreprises, la responsabilité de la régulation du milieu de travail, via des accords majoritaires qui devront, dès 2017, devenir le centre de gravité du système.
Quelle méthode pour y parvenir ?
J.-D. C. Prétendre aboutir à une nouvelle architecture du Code du travail en moins de quatre ans serait irréaliste. C’est pourquoi, il faut en parallèle opter pour un scénario dynamique, permettant de développer sans attendre le champ de la négociation sociale dans les domaines importants que sont les conditions et le temps de travail, l’emploi et les salaires. En veillant cependant à ce que les accords de branche ne verrouillent pas la nécessaire marge de liberté des accords d’entreprise, qui devront s’appliquer en priorité sur ces thématiques. Ce sera tout l’enjeu d’un projet de loi annoncé par le Premier ministre pour 2016.
Comment les employeurs doivent-ils se mettre en ordre de marche ?
J.-D. C. Même si, en matière de dialogue social, les critiques se concentrent souvent sur les seuls syndicats, les employeurs ont eux aussi des responsabilités : des deux côtés de la table, doivent s’asseoir des organisations à la hauteur des exigences. Les entreprises ont, en particulier, besoin de branches puissantes, donc en nombre plus limité. La restructuration des 750 existantes (50 en Allemagne), et la réduction de leur nombre à 100, sont un impératif. En outre, il faut reconnaître qu’au-delà des discours convenus, la négociation n’est pas toujours une priorité des entreprises : à elles de réfléchir à leur organisation (choix des DRH, positionnement par rapport à la direction…). Car si on confie le ballon de la négociation aux partenaires sociaux, ils doivent être en mesure de le jouer au mieux des exigences de l’emploi et de la qualité du travail.
[1] La négociation collective, le travail et l’emploi, rapport France Stratégie, septembre 2015
Propos recueillis par Gladys Lepasteur
Publié dans le magazine Direction[s] N° 135 - octobre 2015