Fabrice Gzil, professeur à l’École des hautes études en santé publique et directeur adjoint de l’Espace éthique d’Île-de-France.
Qu’attendre de ces concertations lancées jusqu’en juillet ?
Fabrice Gzil. Elles doivent surtout être l’occasion de poser verbalement le sujet des maltraitances. On a encore trop de difficultés à l’aborder ouvertement, comme c’est le cas, par exemple, de celui des violences conjugales. Ce sera aussi le moment d’écouter toutes les parties prenantes. Car si durant la crise, notamment, on a beaucoup écouté le Défenseur des droits ou des collectifs de familles, ce moment doit permettre d’entendre les professionnels.
Les conclusions nourriront la stratégie nationale en octobre 2023. Quelles doivent être les priorités ?
F. G. N’anticipons pas, l’enjeu est justement de définir celles qui feront consensus. Même s’il sera essentiel de ne pas éluder le sujet des moyens, financiers en particulier. Il sera en outre important d’envisager comment créer les conditions d’une collaboration sereine entre métiers (médico-social, police, justice, départements, agences régionales de santé…) pour repérer, alerter et répondre aux situations : il faudra donc déterminer qui fait quoi et comment on se fait confiance pour que chacun joue son rôle dans la complémentarité. La définition commune de la maltraitance, désormais inscrite dans le Code de l’action sociale et des familles, était le socle nécessaire pour avancer.
Comment s’assurer que les grands principes infusent les pratiques ?
F. G. Les professionnels seront pour cela associés aux réflexions, la concertation réunissant notamment des syndicats et des ordres professionnels. C’est essentiel pour qu’ils puissent faire remonter les situations rencontrées au quotidien. Invitons les acteurs à participer à l’exercice et à faire preuve de créativité, y compris en proposant des formations, des repères ou des schémas de réponses adaptés aux réalités locales. Tout cela devrait concourir à l’appropriation.
Le management a-t-il un rôle particulier à jouer ?
F. G. Évidemment, en particulier vis-à-vis de son équipe pour créer les conditions de la libération de la parole et que soit apportée, quand il le faut, une réponse ajustée, avec la rapidité nécessaire. Il a aussi un rôle à jouer vis-à-vis des partenaires : celui de bâtir des collectifs, ainsi que des liens de confiance et d’interconnaissance.
Propos recueillis par Gladys Lepasteur
Publié dans le magazine Direction[s] N° 217 - mars 2023