Le contentieux relatif aux expertises du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) vient d'être illustré par une affaire, tranchée le 21 juin par la Cour de cassation, intéressant un établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) associatif. A cette occasion, la Haute juridiction a précisé l'étendue des obligations pesant sur l'employeur en cas de contestation d'une expertise décidée par le CHSCT.
Risques psycho-sociaux
Éclairé par les moyens annexés à l'arrêt, le litige est révélateur des tensions sociales de plus en plus fréquentes dans les Ehpad, comme en témoignent les nombreuses grèves déclenchées ces derniers mois.
En l'espèce, comme le lui permet le Code du travail en cas de risque grave, le CHSCT d'un Ehpad a décidé de faire appel à un expert dans un contexte marqué par "une tension extrême, laissant craindre l'existence de risques psycho-sociaux". En ce sens, les membres du comité ont notamment constaté :
- le mal-être d'une salariée avec atteinte à sa vie ;
- des entretiens Direction/Personnel "qui se passent très mal" ;
- l'épuisement psychologique et physique des salariés ;
- des règlements de comptes entre collègues...
L'expert avait notamment pour mission d'aider le CHSCT :
- à préciser et comprendre "les origines organisationnelles et les mécanismes mis en œuvre dans les situations de travail dans lesquelles ce risque s'illustre" ;
- à formuler des propositions "pour enrichir un plan d'action et suivre des indicateurs précis".
Contestant cette décision, l'association gestionnaire a saisi le président du tribunal de grande instance (TGI) en référé*. Elle est déboutée en appel. Et devant la Cour de cassation, elle n'a pu obtenir gain de cause - sur le principe - qu'en matière de prise en charge des frais de la procédure de contestation de l'expertise.
Prise en charge des frais de procédure
N'ayant pas de budget de fonctionnement, le CHSCT ne peut pas payer les frais de justice (frais de procédure et honoraires d'avocats). La jurisprudence considère que ces coûts doivent être supportés par l'employeur dès lors qu'aucun abus du comité n'est établi.
Dans la présente affaire, les magistrats d'appel ont condamné l'association gestionnaire de l'Ehpad à prendre en charge les honoraires des conseils du CHSCT tels que facturés. Une méthode censurée par la Cour de cassation.
Confirmant une position qu'elle a adoptée en février dernier, la Haute juridiction considère que le montant à la charge de l'employeur doit être fixé par les juges du fond "au regard des diligences accomplies". En d'autres termes, les juges disposent d'un pouvoir de réduction des honoraires facturés.
Les parties ont été renvoyées, sur ce point, devant une autre cour d'appel.
* Ce, dans le respect des règles applicables avant la réforme introduite par la loi Travail du 8 août 2016.
Source : arrêt du 21 juin 2017 de la Cour de cassation, chambre sociale (n° 15-27506).
Sybilline Chassat-Philippe