Ronald Lozachmeur, directeur général d'Assia Réseau UNA (Bretagne)
« Si l’aide à domicile est bien dans le radar du ministère, elle doit en revanche se battre au quotidien face aux grandes directions générales de l’État (du Travail, de l’Économie…) pour qui, en termes de priorité, le secteur arrive loin derrière l’hôpital et les établissements d'hébergement pour personnes âgées », pointe Guillaume Quercy, président de l’union nationale UNA. Comme les autres, les organisations du domicile ont dû, dès la mi-mars, apprendre à vivre en état d’urgence sanitaire. Mais pour elles, en contact quotidien avec des publics fragiles, il a fallu souvent convaincre de l’importance à accorder aussi au « front domiciliaire » salué par la présidente de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA). Garde scolaire pour les enfants, taxis gratuits… « Le secteur n’a évidemment pas été sciemment oublié lors de la mise en place de ces mesures d’abord pour le sanitaire, mais il est évident qu’il n’y a pas eu de prise en compte systématique et immédiate, abonde Stéphane Landreau, secrétaire général de la fédération nationale d’associations Fnaafp-CSF. Et en particulier des services « familles », dont les interventions sont, dans notre réseau, plus nombreuses que celles auprès des personnes âgées et handicapées. »
« Système D »
Sur le terrain, les gestionnaires ont souvent été obligés de réduire la voilure. « Nous nous sommes focalisés sur les personnes très dépendantes et les plus isolées, raconte Ronald Lozachmeur, directeur général d’Assia Réseau UNA, en Bretagne. Nous avons mobilisé, quand c’était possible, d’autres solutions (aidants, voisins, livraisons de courses…) et mis en place un système de roulement entre les salariés. L’objectif étant de les préserver pour pouvoir tenir dans la durée. » Pour cela, une priorité comme ailleurs : l’accès aux équipements de protection. « En trouver, c’est aujourd’hui ce qui occupe la moitié du temps des directeurs », confirme Stéphane Landreau. Après l’échec du premier système de distribution des masques, via les pharmacies, les groupements hospitaliers de territoire (GHT) centralisent le plus souvent les stocks, répartis par les agences régionales de santé (ARS). Pour le reste, c’est la débrouille : via les communes, les commerçants locaux…
Des départements facilitateurs
Et, selon les territoires, avec l’appui bienvenu du conseil départemental. « En lien avec l’ARS, celuide l'Aisne a très vite pris ses responsabilités pour que les services obtiennent du matériel, raconte le directeur général de l’association Aid’Aisne, Dominique Villa. En outre, il a organisé des réunions régulières entre gestionnaires sous contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens (CPOM) pour partager les infos, établi des protocoles d’intervention… »
Le reste (blouses, charlottes et masques FFP2), pourtant indispensable aux contacts avec des personnes contaminées, manque. Pas question de mettre en danger les personnels, ont prévenu les gestionnaires, plus que jamais renvoyés à leurs obligations après la condamnation début avril d’un opérateur des Hauts-de-France, sommé de mieux protéger ses salariés.
Demain, déjà
L’enjeu désormais ? L’accès aux tests de dépistage lancés dans les établissements. A l’image de la récente prime allouée aux personnels, ils seront étendus aux services, a-t-il été confirmé aux fédérations mi-avril. D’ici là, une question se pose déjà : « Les dispositifs de soutien financier déployés durant l’état d’urgence censé se terminer le 24 mai, resteront-ils en vigueur passée cette date ? interroge Stéphane Landreau. Faute de quoi, nous ne tiendrions pas longtemps… »
(1) Tel que le maintien du financement des services fixé par l’ordonnance no 2020-428 du 15 avril 2020.
Gladys Lepasteur
Publié dans le magazine Direction[s] N° 186 - mai 2020