La déclaration d’un accident du travail est une obligation tant pour l’employeur que pour le salarié.
La reconnaissance d’un accident du travail (AT) impacte le taux de cotisation dédié, collectivement fixé par la Caisse d'assurance retraite et de la santé au travail (Carsat) dans les principales branches professionnelles du secteur. Elle permet à la victime d’engager, le cas échéant, la responsabilité civile de l’employeur en cas de faute inexcusable ou intentionnelle. Elle permet au salarié d’être protégé contre le licenciement pendant la suspension de son contrat et d’obtenir une meilleure indemnisation en cas de rupture pour inaptitude ou de manquement à l’obligation de sécurité. L’employeur peut voir aussi sa responsabilité pénale engagée pour défaut, retard de déclaration, pour blessures involontaires ou encore mise en danger d’autrui.
Une obligation…
La victime doit informer son employeur par tout moyen (oralement, par mail, SMS...) le jour où s’est produit l’accident ou au plus tard dans les vingt-quatre heures. Un délai théorique, puisqu’il n’empêche pas la prise en charge, sous réserve d’une déclaration à la caisse primaire d'assurance maladie dans les deux ans.
L’employeur a quarante-huit heures pour le déclarer :
- en ligne par une saisie en déclaration sociale nominative intégrant l’attestation de salaire (https://www.net-entreprises.fr/);
- à défaut, via le formulaire Cerfa 14463*03, notamment si le salarié a quitté l’entreprise au jour de la déclaration.
Il doit ensuite remettre au salarié une feuille d’accident avec trois volets de soins, nécessaire à son indemnisation et sur laquelle celui-ci fera constater les lésions par son médecin.
… sous peine de sanction
Dans les cas rares d’accidents mortels, le gestionnaire doit aussi informer l’inspection du travail au plus tard dans les douze heures suivant le décès. Dès lors qu’il a connaissance d’un AT, l’employeur doit le déclarer sous peine d'une amende de 750 € maximum (3 750 € pour une personne morale) et de sanctions civiles comme le remboursement de tout ou partie des dépenses occasionnées par l’accident. S’il souhaite contester les faits, il peut émettre des réserves (lire l’encadré). Ce qui contraindra la caisse à instruire la déclaration.
Sur le fond, la caisse vérifie l’existence d’un accident qui, quelle qu’en soit la cause, est survenu par le fait ou à l’occasion du travail à quelque titre et en quelque lieu que ce soit. Le fait accidentel doit donc avoir une date certaine, résulter d’un événement ou d’une série d’évènements et avoir entraîné une lésion corporelle ou psychologique.
En cas de reconnaissance, la caisse dispose de trente jours francs pour statuer, sauf en cas d’investigation où la procédure impose un délai de quatre-vingt-dix jours francs. À l’issue de ces périodes, son silence vaut reconnaissance implicite. L’entreprise doit donc être attentive aux courriers et aux délais imposés pour formuler ses observations. Un suivi consciencieux garantit le respect du contradictoire et évite que le dossier ne soit instruit sur les seules affirmations de la victime.
En cas de reconnaissance du caractère professionnelle de l’accident, l’employeur peut contester en saisissant la Commission de recours amiable (CRA) ou la commission médicale, dans un délai de deux mois. Si cette dernière confirme la décision, l’entreprise a encore la possibilité de saisir le pôle social du Tribunal judiciaire dans les deux mois.
Frédérique Marron, avocate, Capstan avocats Lyon
Pourquoi émettre des réserves
Il s’agit de démontrer que la matérialité des faits n’est pas établie, de contester les circonstances de temps et de lieu (absence de témoin, absence de constatation médicale des lésions le jour de l’accident ou dans un temps voisin, information tardive de l’employeur, apparition progressive des lésions, etc.). Nous recommandons de formuler les réserves en même temps que la déclaration. À défaut l’employeur dispose de dix jours francs à compter de sa déclaration ou de la réception de celle faite par la victime. Notre conseil est d’émettre des réserves circonstanciées, appuyées sur des éléments de fait et de fournir dans la mesure du possible des pièces justificatives. Attention ! Dès lors que l’accident intervient aux lieu et temps de travail, il est présumé être un accident du travail. Il faut donc être vigilant sur les termes employés dans la déclaration. Cette présomption d’imputabilité ne peut être renversée que par la preuve que le salarié s’est soustrait à l’autorité de son employeur ou que l’accident a une cause totalement étrangère au travail.
Publié dans le magazine Direction[s] N° 223 - octobre 2023