Laurent Bizien, chargé de mission à la Mapes.
Le décret dit « tertiaire » de 2019 contraint les bâtiments à usage tertiaire de plus de 1 000 mètres carrés à réduire leur consommation d’énergie. Celui de juillet 2022 relatif aux bilans d’émissions de gaz à effet de serre renforce les obligations des organisations. Le nouveau référentiel d'évaluation de la qualité de la Haute Autorité de santé prend désormais en compte la stratégie d'optimisation des achats et de développement durable. La loi Egalim impose une restauration collective plus durable et la loi « Agec » le traitement des biodéchets… De nombreuses réglementations obligent les établissements sociaux et médico-sociaux à mener une politique en faveur du développement durable [1], formalisée dans une stratégie de responsabilité sociale des entreprises (RSE) ou responsabilité sociétale des organisations (RSO). Sachant que « le secteur de la santé est responsable de 8 % des émissions de gaz à effet de serre en France », rappelle Laurent Bizien, chargé de mission à la Mission d'appui à la performance des établissements et services sanitaires et médico-sociaux (Mapes).
Souvent au siège
Qui pour ce faire ? Dans le secteur, les responsables RSE sont peu nombreux. Par exemple, dans la région des Pays de la Loire, qui compte 1 400 structures médico-sociales, la Mapes a identifié une petite cinquantaine de personnes dotées d'une casquette « RSE », entièrement ou partiellement chargées de cette mission. Chez les gestionnaires, cette fonction est souvent portée au siège par le responsable Qualité Sécurité Environnement (QSE). Pertinent selon Olivier Toma, fondateur de Primum Non Nocere, une agence de conseils en RSE : « La RSE est finalement une démarche qualité étendue à son écosystème. » Dans les plus petites structures, la mission est assumée par les membres de la direction en fonction des projets qu'ils mènent (RH, communication, achats..). Ou confiée à une personne, souvent en charge d’autres fonctions.
S’il n’y a pas d'organisation-type, il n'y a pas non plus de profils-types qui occupent cette fonction. « Certains ont des diplômes universitaires ou ont suivi des cursus courts en formation continue en développement durable. D’autres n’ont pas de diplôme spécifique RSE mais sont volontaires et apprennent sur le tas, explique Laurent Bizien. Mais, il est utile de développer un solide bagage sur au moins une des expertises de la RSE. »
Démarche liée au projet associatif
La RSE résonne avec les valeurs du social et du médico-social. « Elle est intrinsèquement liée à notre projet associatif et à notre fonctionnement quotidien », pointe Aline Chantreau, directrice QSE à l’association Audacia (Poitiers). Souvent, sur le terrain, les professionnels mènent des actions en lien avec le développement durable – du compostage, des achats auprès de fournisseurs locaux, par exemple – sans y apposer le terme RSE. Ainsi, jusqu’à l’arrivée d’Aline Chantreau, chaque structure d’Audacia menait ses actions « dans son coin ». La directrice résume ainsi le travail mené : structurer, formaliser, mettre en place des outils de suivi, diffuser les bonnes pratiques et mettre en place une labellisation, garante de l’engagement RSE de la structure. Le tout en lien avec la sécurité. Aujourd’hui, la RSE s’inscrit dans une « démarche globale et intégrée ».
Une telle stratégie demande du temps, de l’expertise, des investissements et de la formation… « Mais la RSE est rentable, assure Olivier Toma. Ce n’est pas une dépense en plus. L’enjeu est de réduire les gaspillages, économiser l’énergie, optimiser les dépenses de santé, créer des emplois locaux non délocalisables, améliorer la qualité de vie au travail et développer l'attractivité. »
[1] Lire Direction[s] n° 223, dossier p. 24
Alexandra Luthereau
« Un poste, trois missions »
Marie Tual,chargée de mission RSE de l’Adapei de Loire-Atlantique
« J’ai étudié en école de commerce, avec l’objectif de m’orienter vers le développement durable. J’ai davantage un profil RSE que médico-social. Au quotidien, mon poste comporte trois missions principales. D’abord, entretenir une dynamique interne, en informant et sensibilisant les ambassadeurs RSE des quatre-vingts sites du territoire. Ensuite, mettre en place des partenariats externes. Et enfin, développer des projets en interne. Certains d'entre eux sont transverses à tous les sites, comme la labellisation RSE. D’autres viennent des professionnels en établissement. Je les fais connaître aux ambassadeurs et leur propose de les dupliquer. Parmi nos derniers projets, citons la plantation d’une mini-forêt participative et ouverte sur le quartier d’un de nos sites, l'instauration du forfait mobilité douce pour les salariés ou encore la valorisation des biodéchets avant même l’entrée en vigueur de l’obligation. Finalement, la RSE est en quelque sorte le prolongement de notre contribution sociétale sur les volets social et environnemental. »
Publié dans le magazine Direction[s] N° 228 - mars 2024