Nicolas Sarkozy clôturant la seconde Conférence national du handicap, le 8 juin.
Circonspection, scepticisme, voire franche déception. Le bilan dressé par les professionnels semble unanime à l'issue de la seconde Conférence nationale du handicap (CNH), du 8 juin dernier. Ambition gouvernementale affichée pour ce grand rendez-vous institutionnel ? « Entretenir l'impulsion donnée par la loi du 11 février 2005 à la politique en faveur des personnes handicapées. » C'est peu dire que les attentes étaient grandes, tant, au préalable, les acteurs avaient multiplié les signaux d'alerte, déplorant une « triple crise sociale, budgétaire et culturelle » (1). De fortes attentes que les déclarations présidentielles ne sont décidément pas parvenues à combler.
Plus nombreux, plus qualifiés
Premier thème abordé : la scolarisation. Plus de 200 000 enfants handicapés sont aujourd'hui scolarisés en milieu ordinaire. Pour faire face aux besoins croissants, 2 000 auxiliaires de vie scolaire (AVS) qualifiés seront recrutés dès septembre 2011 (4500 en 2012 et 7200 en 2013). Afin d'améliorer leur accompagnement, les personnes en contrat aidé, actuellement en poste, seront, dès l'an prochain, progressivement remplacées par des professionnels mieux formés. Insuffisant, selon la Conférence des gestionnaires, pour qui les annonces manquent indéniablement de clarté. « L'augmentation et la pérennisation du nombre d'AVS ne peuvent résoudre l'ensemble des besoins […]. Il faut également agir pour le développement des places en services d’éducation spécialisée et de soins à domicile [Sessad] », préviennent-ils.
Au programme encore : la relance de la réflexion relative à la gestion et à la sécurisation des AVS individualisés (AVS-i) par les associations, ainsi que la rénovation du mode de tarification des établissements et services spécialisés. Enfin, la nécessaire coopération entre le secteur médico-social et l'Éducation nationale a été… réaffirmée, sous l'égide conjuguée des Agences régionales de santé et des rectorats.
Travail protégé développé
Sur le front de l'emploi, la modernisation du secteur du travail protégé reste l'objectif majeur. Entre 2012 et 2014, 1 000 postes par an seront crées dans les entreprises adaptées (EA). Une mesure applaudie, en particulier par l'Union nationale des entreprises adaptées (Unea), qui se félicite d'avoir été entendue. Sans compter l'attribution d'une enveloppe de contrats aidés pour les travailleurs handicapés. Enfin, outre la création annoncée d'un Centre national d'appui et de ressources (Cnar), le mode de tarification des établissements et services d'aide par le travail (Esat) devrait être réformé « pour mieux tenir compte de l'évolution du public ». Rien de plus, en somme, que le rappel de la réflexion déjà amorcée par le secteur aux côtés de l'ancienne Direction générale de l'action sociale concernant le plan de modernisation des Esat (2).
Autre mesure… remarquée : le « déblocage » d'une enveloppe de 150 millions d'euros consacrés, en grande partie, à la mise en accessibilité des lieux de travail de la fonction publique, et financés par le Fonds pour l'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique (FIPHFP). Un véritable « hold-up », dénoncé par le directeur général de l'Association des paralysés de France (APF), Claude Meunier (3).
Précaution de rigueur
« Les annonces faites en ces temps préélectoraux n'engagent que ceux qui les écoutent », confie un responsable du secteur. L'Association des instituts thérapeutiques, éducatifs et pédagogiques et de leurs réseaux (Aire) appelle, pour sa part, à la vigilance quant à « la mise en œuvre effective de ces engagements ». « Nous espérons que cette journée sera rapidement suivie de mesures concrètes, précisément listées et budgétées », prévient l'association des accidentés de la vie Fnath. « Malgré une impulsion nouvelle, tout cela manque de chiffres et d'échéanciers précis, confirme Thierry Nouvel, directeur général de l'Union nationale des associations de parents, de personnes handicapées mentales et de leurs amis (Unapei). Nous proposerons donc prochainement une série d'indicateurs, susceptibles de donner corps à ces mesures [qui pourraient être étudiées] dans le cadre du futur comité de suivi de la CNH, récemment annoncé par la secrétaire d'État, Marie-Anne Montchamp. » La vigilance devra donc être de mise à l'occasion des débats relatifs au budget 2012.
(1) Lire Direction(s) n° 86, p. 6
(2) Lire Direction(s) n° 81, p. 4
(3) Lire ce numéro p. 22
Gladys Lepasteur
Publié dans le magazine Direction[s] N° 87 - août 2011