« En cas de réforme, une réflexion préalable est nécessaire pour assurer une cohérence d’ensemble. C’est tout le système qui est à revoir », prévient la directrice déléguée à la Fédération des associations gestionnaires au service des personnes handicapées Fegapei, Marie Aboussa. Les pouvoirs publics sont donc prévenus, après la remise fin novembre du rapport des inspections générales des Affaires sociales (Igas) et des Finances (IGF). Au menu ? L’adaptation de l’offre aux besoins et les modalités d’une réforme tarifaire dans le secteur du handicap.
Un manque d’outils
« La mission recommande de privilégier une démarche de redéploiement de l’offre et de reconsidérer les objectifs de convergence […] au profit d’une péréquation en fonction des besoins [locaux] », résume le rapport. « Les financements publics consacrés au secteur s’élèvent à 16 milliards d’euros par an, rappelle Laurent Vachey (IGF). C’est un effort de solidarité nationale conséquent. Faute de réflexion sur des outils de mesure des situations et sur l’adaptation de l’offre, on risque de se donner des priorités, sans instrument sérieux pour construire la politique du handicap de demain. » Manquent ainsi à l’appel des instruments susceptibles de décrire la réalité des prestations des structures et de mesurer les besoins d’accompagnement. Dont acte, note Patrice Tripoteau, directeur général adjoint de l’Association des paralysés de France (APF), « mais la question du projet de vie ne doit pas être écartée. On ne peut se contenter de catégoriser les individus et de définir des indicateurs uniquement économiques ou fonctionnels. » Une harmonisation des pratiques des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH), ainsi qu’un meilleur échange d’informations avec les structures devront également être à l'ordre du jour.
Une question de méthode
En matière de financement, le système est également à revoir. Dans l'optique d’une réforme, les auteurs ont passé en revue neuf chantiers. Verdict ? La clé du succès relève d’abord d’une question de méthode, assure Laurent Vachey. « Dans le secteur de l’hébergement d’urgence par exemple, on a commencé par une description organisée des prestations, une étude nationale de coûts, avant d’envisager un scénario tarifaire – contrairement aux services de soins infirmiers à domicile [Ssiad], où l’administration a cherché à brûler les étapes, en mettant d’emblée sur la table un modèle d’allocation de ressources. » À noter, parmi les préconisations : l’adaptation des indicateurs médico-sociaux économiques, la fin de la distinction juridique entre maisons d’accueil spécialisées (MAS) et foyers d’accueil médicalisé (FAM) ou encore la mise en place d’une politique d’incitation à la maîtrise des frais de transports.
Gladys Lepasteur
Neuf préconisations transitoires
- Généralisation d’un système d’échanges de données harmonisée entre les MDPH, les établissements et services médico-sociaux (ESMS) et les responsables des programmations départementales et régionales ;
- Organisation des échanges d’éléments d’évaluation entre MDPH et ESMS;
- Exonération d’un appel à projets en cas d’adaptation de l’offre d’un ESMS existant dans le cadre d’un contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens;
- Redéfinition des enquêtes nationales;
- Redéfinition de l’architecture technique des remontées des MDPH vers le niveau national, via le système d’information « SipaPH »;
- Généralisation d’un financement en dotation globale des ESMS;
- Amélioration du contrôle de la ressource allouée par des indicateurs homogènes;
- Sortie d’une vision de la dépense publique par financeur et par sous-Ondam;
- Transfert du financement intégral des FAM et des centres d'action médico-sociale précoce dans le champ de l’assurance maladie, et des établissements et services d'aide par le travail dans celui des départements.
Publié dans le magazine Direction[s] N° 104 - février 2013