Une véritable bronca associative s’est déclenchée à l’issue de l’adoption le 26 mai dernier du projet de loi sur l’asile au palais du Luxembourg, en première lecture. Parmi les modifications opérées par les sénateurs sur le texte approuvé par les députés fin 2014 ? La restriction de l’accès des déboutés au dispositif d’hébergement d’urgence. Intolérable pour un collectif de 18 organisations [1], qui ont dénoncé « une remise en cause de l’accueil inconditionnel » dans une lettre ouverte au ministre Bernard Cazeneuve au lendemain du vote. « Cette mesure est contraire au Code de l’action sociale et des familles, pointe Florent Gueguen, directeur général de la fédération Fnars. La situation de détresse doit primer sur le statut administratif des personnes. » Autre disposition controversée ? La possibilité de clore le dossier d’asile en cas d’abandon, sans motif légitime, du lieu où était hébergé le demandeur.
Défaut de moyens
« Nombre de modifications introduites au Sénat, à la constitutionnalité douteuse et tenant davantage de la posture politique, seront retoquées à l’Assemblée, qui reviendra à la version antérieure », pronostique Pierre Henry, directeur général de France Terre d’asile, après l’échec de la commission mixte paritaire (CMP) du 10 juin.
Le projet de loi devait retourner dans les deux chambres cet été. La réforme, qui promeut notamment la généralisation du modèle des centres d’accueil pour demandeurs d’asile (Cada), pêche pourtant toujours par absence de moyens. « Seul un plan d’urgence peut dès à présent permettre de répondre au défi actuel posé à l’Europe par la hausse des arrivées de potentiels demandeurs dans des conditions indignes », insiste Pierre Henry. Les annonces du gouvernement (4 000 places d’hébergement pour les demandeurs d’ici 2016 et 1 500 d’urgence) suffiront-elles ?
[1] Parmi lesquelles la Fondation Abbé Pierre, la Fnars, Emmaüs France, Coallia, France Terre d'asile…
Justine Canonne
Publié dans le magazine Direction[s] N° 133 - juillet 2015