Ange Finistrosa (Fnat) © Vincent Pancol
Que vous inspire le renforcement de la primauté familiale, voulu par le ministère ?
Ange Finistrosa. C’est une bonne chose quand la situation le permet – sous réserve d’être attentif au contrôle de la gestion exercée par le proche habilité. Au-delà, la déjudiciarisation doit s’accompagner d’un travail de vulgarisation sur les obligations des tuteurs familiaux, en particulier en cas de création d’une « passerelle » entre les protections professionnelle et familiale. C’est l’enjeu de l’information et du soutien aux tuteurs familiaux (ISTF) qui a attendu dix ans pour obtenir un financement sécurisé.
Repenser le contrôle des mesures, via une réflexion sur l’éthique et la déontologie des mandataires, est aussi au menu. Une satisfaction ?
A. F. Nous avons enfin été écoutés sur la question du statut, même si on peut regretter qu’elle soit abordée sous le prisme du contrôle… Le ministère envisage d’externaliser cette fonction, en la confiant à des commissaires aux comptes par exemple. Cela impliquerait de faire payer les majeurs protégés, là où l’intervention des services se fait au titre de la solidarité nationale. Pourquoi ne pas confier cette mission, une fois son contenu défini, aux services fiscaux, ou à un corps ad hoc de mandataires ? Des pistes dont devra se saisir le futur groupe de travail créé au sein de la Chancellerie.
Quel est l’enjeu de la mesure unique en réflexion ?
A. F. Calée sur le modèle de la curatelle, elle prévoirait que les domaines dans lesquels la personne doit être représentée soient listés par le juge. Ce qui lèverait le doute existant sur la conformité de la tutelle avec la Convention des Nations unies et aurait le mérite de la clarté. Par ailleurs, elle serait prononcée par un « juge de la protection », dont l’intervention en cours de mesure serait limitée aux situations difficiles. De quoi assurer le nécessaire transfert de confiance entre lui et le protecteur, rendu plus autonome.
En revanche, rien sur le financement du secteur ?
A. F. Non. Et pour récupérer les 31 millions d’euros nécessaires au financement de l’activité, l’État prévoit de réviser le barème de participation financière des majeurs protégés et de mettre à contribution les plus petits revenus, comme les bénéficiaires de l’allocation adultes handicapés (AAH) ! C’est inacceptable pour eux, comme pour les gestionnaires placés dans une position intenable. En outre, le projet de décret rend la disposition applicable en avril 2018, ce qui rendra aussitôt caduques les budgets prévisionnels déposés en octobre dernier.
Propos recueillis par Gladys Lepasteur
Publié dans le magazine Direction[s] N° 159 - décembre 2017