Quels éléments positifs retenez-vous ?
Nathalie Latour. Sur le fond, l’instruction tient compte des avancées obtenues pendant la crise, notamment en termes d’aller-vers. La fragilité de certains publics est aussi reconnue, avec le renforcement dans le champ Accueil, hébergement, insertion (AHI) des interventions des centres de soins, d'accompagnement et de prévention en addictologie (Csapa) et d'accompagnement à la réduction des risques des usagers de drogues (Caarud). Depuis des années, nous plaidions pour une évolution des dispositifs en faveur des publics précaires souffrant d’addictions : avec les confinements, il est devenu évident qu’une approche de réduction des risques était nécessaire pour stabiliser leurs problématiques, comme l’a ensuite entériné la délégation interministérielle à l'hébergement Dihal. Autre mesure importante ? L’extension au secteur des revalorisations issues du Ségur à compter du 1er janvier. C’était une urgence vu les difficultés existant en termes de ressources humaines : de nombreux postes d’infirmiers ne sont pas pourvus, et la situation est désormais aussi tendue chez les travailleurs sociaux.
Pourquoi ce sentiment mitigé dans ce cas ?
N. L. Parce que ces avancées essentielles n’occultent pas la forme qui reste problématique. Trop de flou et d’incertitudes subsistent. Pire : alors même que certaines enveloppes sont connues depuis des mois, comme celles du Ségur, des mesures importantes sur l’addictologie et les revalorisations salariales restent à paraître dans une seconde instruction… « avant la fin de l’année » !
La création des nouvelles équipes médico-sociales est-elle tout de même une bonne nouvelle [1] ?
N. L. Absolument, nous y sommes favorables. Mais, là encore, comment attendre des gestionnaires qu’ils répondent aux appels à projets en un temps record, alors qu’ils font toujours face à la crise et, maintenant, à la gestion du passe sanitaire ? Ils ne savent même pas ce qui sera attendu d’eux demain, les textes censés réviser les missions des Csapa et des Caarud étant toujours manquants. Cela revient à leur demander de placer une pièce du puzzle sans avoir une vision d’ensemble ! Manque d’anticipation et de concertation : à croire que le système retombe dans ses vieux travers. Comme si l’intelligence collective dont a fait preuve le secteur durant la crise et le dialogue nourri alors avec les pouvoirs publics étaient balayés.
Instruction interministérielle n° DGCS/1B/3A/5C/DSS/1A/DGS/SP2/SP3/2021/120 du 8 juin 2021
[1] Décret n° 2021-1170 du 9 septembre 2021
Propos recueillis par Gladys Lepasteur
Publié dans le magazine Direction[s] N° 201 - octobre 2021