« Lorsqu’il décide de confier un mineur à l’aide sociale à l’enfance (ASE), le juge des enfants ne peut pas accorder à l’un des parents (ou aux deux) un droit d’hébergement à temps complet. » Confirmant un précédent avis [1], la Cour de cassation a remis en cause, début octobre, les pratiques actuelles de placement éducatif à domicile (PEAD), qui relèvent selon elle d’une mesure d’action éducative en milieu ouvert, renforcée ou intensifiée, éventuellement avec hébergement.
Complémentaires, les deux démarches sont pourtant distinctes, rappelle l’Association nationale des maisons d’enfants à caractère social (Mecs) : « Le PEAD confie la responsabilité globale de la protection de l’enfant à un tiers : l’ASE. Il en découle un exercice conjoint de la responsabilité éducative […] et la capacité d’offrir un hébergement de repli ou de répit à tout moment. » À l’heure de la désinstitutionnalisation, la décision passe mal. « Elle va à l’encontre des dernières lois sur la protection de l’enfance et recommandations plaidant pour la diversification des modes de prise en charge », réagit Sébastien Decoster, directeur de la Mecs Au Bercail (Alsace), à laquelle est adossé un service d’accompagnement à domicile renforcé.
Sécurisation juridique
Pour la protection de l’enfance, déjà mal en point, difficile de se priver de cette alternative. « Même si nos autorités se veulent rassurantes, cette décision fait jurisprudence, reprend Sébastien Decoster. Si un avocat s’engouffre dans la brèche, tous les PEAD pourraient être annulés demain. Que ferons-nous alors de tous ces enfants, l’Alsace comptant déjà un nombre exorbitant de placements non exécutés ? » D’où l’urgence de créer un cadre juridique sécurisé, assorti des financements adéquats, plaide la fédération d’associations Cnape : « Faute de quoi, la question de la pérennité des structures de PEAD à plus ou moins long terme va se poser. »
Pourvoi n° 21-25.974 du 2 octobre 2024
[1] Avis du 14 février 2024
Gladys Lepasteur
Publié dans le magazine Direction[s] N° 235 - novembre 2024