« Mon burn-out n'est pas arrivé brutalement. C’est une accumulation vers laquelle le Covid a commencé à me faire glisser. Directrice d’une petite association en milieu rural avec un conseil d’administration absent, je me suis retrouvée dans une extrême solitude face aux injonctions contradictoires et au flux considérable d’informations. Surtout pour l’établissement et service d'aide par le travail (Esat) qui demandait de revoir sans cesse l’organisation. C’est là que le surmenage a commencé.
"Je n'ai jamais pu récupérer"
J’ai décidé de quitter mon poste pour rejoindre une association plus structurée avec un siège pour être moins isolée. Je suis arrivée dans un contexte managérial compliqué avec des cas de harcèlement. Devoir gérer l’obligation vaccinale en plus des projets à mener en a remis une couche. Je me suis fait arrêter une semaine et me suis dit qu’il ne fallait pas que je reste là. J’ai donc encore changé de structure en me disant que ca irait mieux. Mais là encore, le contexte managérial était extrêmement tendu avec trois alertes en quelques mois.
Je n’ai jamais pu récupérer en me posant dans une organisation un peu stable. Le médecin du travail m’a dit de me mettre à l’abri pour me protéger. Je me disais qu’il fallait que je tienne. J’avais un entretien pour harcèlement à mener, un conseil d'administration... J’avais juste envie de pleurer.
"Des signes à écouter"
Arrêtée, j'ai dormi pendant trois semaines. Mon énergie était à zéro. Je suis encore fatiguée dès que je fais quelque chose. Mais je commence à me resocialiser. La grande question maintenant, c’est mon avenir professionnel. Je pense à quitter le secteur bien trop lourd pour ma personnalité : je ne suis pas sûre de pouvoir réguler mon investissement.
Je ne sais pas si aujourd'hui je ferais les choses différemment. Tant qu’on n’est pas confronté au burn-out on ne réalise pas. Il y a pourtant des signes à écouter : être aussi fatiguée au retour de vacances qu’au départ, être dans un état de stress permanent… Il manque clairement des choses au niveau des agences régionales de santé pour les directeurs. Ce n’est pas un sujet dont elles se saisissent alors que c’est compliqué pour quelqu’un en burn-out de demander de l’aide. Il y a vraiment un sentiment de honte et de culpabilité de ne pas y arriver. Surtout chez une personne très investie. »
Propos recueillis par Laura Taillandier