Lorsqu'un salarié est déclaré inapte au travail, l'employeur est tenu à une obligation de reclassement. En cas d'impossibilité de reclassement, l'employeur peut être amené à licencier le salarié. Cette recherche de reclassement doit s'étendre à l'ensemble des activités de l'entreprise et le cas échéant au sein du groupe auquel elle appartient. D'où l'importance de bien déterminer ce qui relève du périmètre de reclassement. Le secteur médico-social n'échappe bien évidemment pas à cette obligation posée par le code du travail comme l'illustre un arrêt de la Cour de cassation du 16 mars 2016.
Un directeur d'établissement licencié pour inaptitude
L'association les Papillons blancs Epernay embauche à l'été 2000 un directeur d'établissement chargé du secteur de l'enfance pour exercer ses fonctions au sein de trois structures (un institut médico-éducatif, un centre d'accueil spécialisé, familial et thérapeutique et un service d'éducation et de soins spécialisés à domicile). Se plaignant d'une dégradation de ses conditions de travail depuis l'arrivée d'un nouveau président d'association, l'intéressé est en arrêt maladie fin 2010. A la suite d'une visite de reprise en novembre 2012, il fait l'objet d'un avis d'inaptitude à tous les postes relevant de la gouvernance des établissements Papillons blancs. Cherchant à le reclasser, l'association lui propose en janvier 2013 un poste de directeur de la résidence de l'horticulture et du foyer, proposition refusée par l'intéressé. Lequel est finalement licencié en février 2013 (et non en 2003 comme il est indiqué dans l'arrêt) pour inaptitude et impossibilité de reclassement.
Employeur condamné
La Cour d'appel de Reims, dans un arrêt du 5 mars 2014, condamne les Papillons blancs pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, estimant que l'employeur aurait dû élargir sa recherche de reclassement, notamment à l'Unapei "dont il était membre et dont les statuts produits établissent qu'elle avait pour but de fédérer et promouvoir les associations Papillons blancs, ce dont il s'évinçait que c'était une structure dans laquelle la mutation du personnel ou partie du personnel était possible".
L'association, qui admet ne pas avoir cherché de poste de reclassement au sein de l'Unapei, a méconnu son obligation de reclassement, tranche la cour d'appel qui la condamne de ce fait à payer au directeur 150 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (l'ancienneté du salarié - plus de 12 ans - et son âge - près de 65 ans - expliquent sans doute un tel montant d'indemnités, auxquelles s'ajoutent d'autres sommes liées au préavis et aux congés payés).
Mauvaise analyse des juges
L'employeur porte l'affaire en cassation avançant ces arguments : selon lui, la seule appartenance d'une association à une structure qui a pour objet de fédérer et d'unir des associations ayant le même objet ne suffit pas à caractériser entre elles une permutabilité de leur personnel ; que le juge aurait dû faire ressortir en quoi leurs relations permettent concrètement d'assurer une permutation des salariés ; qu'en se bornant à relever que l'association est membre de l'Unapei et que cette dernière a pour objet, selon ses statuts, de fédérer et de promouvoir les associations Papillons blancs, la cour d'appel de Reims n'a nullement caractérisé, à ses yeux, une possible permutation de personnel entre ces différentes structures, privant ainsi sa décision de base légale au regard de l'article L. 1226-2 du code du travail.
La démonstration de l'employeur convainc les magistrats de la Cour de cassation, qui décident donc "qu'en se déterminant ainsi, par des motifs impropres à caractériser la possibilité d'effectuer entre l'association et la fédération une permutation de tout ou partie du personnel, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision". La cassation est prononcée et l'affaire est renvoyée devant une autre cour d'appel pour être de nouveau jugée sur le fond.
Source : arrêt du 16 mars 2016
Linda Daovannary