Un nouvel arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation, daté du 6 octobre, cadre l'étendue de la protection accordée aux "lanceurs d'alerte" qui dénoncent des faits de maltraitance dans un établissement ou service social ou médico-social (ESSMS).
De la nullité du licenciement
En cas de licenciement, l'article L. 313-24 du code de l'action sociale et des familles (CASF) permet au juge de prononcer la réintégration du salarié concerné si celui-ci le demande.
Tel fut le cas, par exemple, dans cette affaire tranchée par la Cour de cassation le 26 septembre 2007 où l'employeur reprochait au salarié d'avoir dénoncé des actes de maltraitance : la nullité du licenciement a été prononcée et la réintégration sous astreinte ordonnée.
En revanche, si la dénonciation d'actes de maltraitance intervient de mauvaise foi, elle peut donner lieu à un licenciement pour faute grave. Il en a été ainsi dans cet arrêt du 6 juin 2012 où une salariée avait porté des accusations de maltraitance non fondées à l'encontre de responsables d'un centre éducatif et manipulé des jeunes pour crédibiliser ces accusations. Les juges avaient alors considéré que cette dénonciation était mensongère, qu'elle s'était insérée dans une campagne de calomnie et procédait d'une volonté de nuire à des membres du personnel d'encadrement. La mauvaise foi ayant été démontrée, la faute grave avait été retenue. Plus récemment, dans la lignée de cette jurisprudence, la Cour de cassation a approuvé le licenciement pour faute grave d'un médecin coordonnateur qui "n'avait pas témoigné de mauvais traitements ou de privations infligés à une personne accueillie à l'Ehpad mais avait dénoncé les conditions de travail du personnel de l'établissement qu'il estimait mauvaises et nuisibles à la qualité de prise en charge des résidents".
Insuffisance professionnelle
Dans ce nouvel arrêt du 6 octobre 2017, les hauts magistrats ont retenu un autre grief : l'insuffisance professionnelle.
L'affaire oppose une association assurant une mission de réinsertion de jeunes en difficulté à sa salariée - directrice d'un centre éducatif et professionnel (CEP).
L'intéressée accuse son employeur de l'avoir licenciée notamment parce qu'elle avait signalé au procureur de la République des actes de maltraitance au sein du CEP... mais ce n'est pas ce qu'a retenu la cour d'appel.
Selon les juges du fond, la lettre de licenciement faisait apparaître que la salariée n'avait pas été licenciée en violation de l'article L. 313-24 du CASF pour avoir signalé aux autorités des actes de maltraitance mais pour des faits d'insuffisance professionnelle, son employeur lui reprochant un management inadapté ainsi que le non-respect des règles internes de fonctionnement en cas de constatation d'actes graves au sein de l'établissement. Ce qui constituait bien une cause réelle et sérieuse pour la licencier. La Cour de cassation n'y voit rien à redire et rejette donc le recours de la directrice.
Source : arrêt du 6 octobre 2017.
Linda Daovannary