Nicolas Mérille, conseiller national accessibilité universelle à l'APF.
Dans le droit fil de l’ordonnance du 26 septembre dernier [1] sur la mise en accessibilité des établissements recevant du public (ERP), le contenu des Agendas d’accessibilité programmée (Ad’ap), à déposer d'ici le 27 septembre 2015, est détaillé par décret. Ils doivent notamment comporter la dénomination et la catégorie d'établissement, la nature des travaux à réaliser, leur programmation et leur estimation financière. Pour ce type de chantier sur une seule période de trois ans, le dossier doit être assorti d'une demande d’autorisation de construire ou d'aménager [2]. Le préfet dispose de quatre mois pour instruire le projet d'agenda, à l’issue desquels son silence vaut approbation, sauf demande de dérogation ou rejet de l’autorisation de travaux. Un dossier non accepté doit être resoumis dans un délai défini par l’autorité, n’excédant pas six mois.
En outre, la durée d’exécution d'un Ad’ap peut être prorogée si le gestionnaire d'ERP se manifeste au moins trois mois avant la date prévue. « La prolongation pourra alors être d’un an. Voilà la "sanction" en cas de non-respect d'une obligation inscrite dans l'agenda... », déplore Nicolas Merille, conseiller national Accessibilité universelle à l’Association des paralysés de France (APF).
De larges exceptions
Autre point dénoncé par ce dernier : « un régime d’exceptions excessivement ouvert ». Un second décret liste ainsi les motifs de dérogation aux règles d’accessibilité : impossibilité technique, disproportion manifeste entre les améliorations apportées et leur coût, monument classé… ou opposition des copropriétaires d’un bâtiment à usage principal d’habitation abritant un ERP. « Ce refus n’aura même pas à être motivé. Pourquoi ajouter cette possibilité de déroger quand les autres suffisaient ? », s’indigne Nicolas Merille. Qui ne cache pas « l’écœurement » de l’APF : « Sans surprise, ces textes mettent en œuvre une ordonnance déjà catastrophique. Nous demanderons d’ailleurs aux parlementaires de ne pas la ratifier, car elle constitue une atteinte à la liberté d’aller et venir et une régression des droits au regard de l’ambition de la loi Handicap de 2005. »
Décrets n° 2014-1326 et n° 2014-1327 du 5 novembre 2014
[1] Lire Direction[s] n° 125, p. 12
[2] D'autres exigences concernent les demandes portant sur plusieurs ERP ou sur deux périodes de trois ans en cas de contraintes techniques ou financières particulières.
Justine Canonne
Publié dans le magazine Direction[s] N° 126 - décembre 2014