Que signifie cette décision ?
Ange Finistrosa. Le décret, préparé précipitamment sur injonction de Bercy, prévoyait la suppression de la franchise sanctuarisant les revenus inférieurs au montant de l’allocation aux adultes handicapés (AAH) [2]. Cela revenait à faire contribuer les personnes à hauteur de 0,6 % de leur aide dès le premier euro supplémentaire perçu. Le Conseil d’État a supprimé cette disposition jugée « manifestement disproportionnée », préservant ainsi les plus vulnérables d’une hausse de la participation à leur mesure de protection.
Le secteur ne s’est-il pas tiré une balle dans le pied ?
A. F. C’est sûr qu’attaquer ce texte n’était pas une décision facile, car il garantissait aussi le financement des services. Placé à la croisée d'intérêts divergents, le secteur associatif à l’origine du recours [3] a pourtant fait le choix de défendre ceux des personnes. Ce non sans avoir maintes fois alerté en amont sur la faute politique que représentait une telle mesure. Laquelle a conduit, en outre, à brouiller l'action de ce gouvernement qui avait eu le courage de revaloriser l’AAH.
Quels impacts pour les gestionnaires ?
A. F. Les sommes prélevées à ce titre aux personnes doivent leur être remboursées, et ce à compter du 1er septembre 2018. Soit quelque 16 millions d’euros au niveau national, selon nos estimations. Nous discutons avec la Direction générale de la cohésion sociale (DGCS) des incidences de cette annulation qui affecte les budgets 2018, 2019 et même du début 2020. On voit mal comment l’État pourrait refuser d’en endosser la responsabilité financière… Au-delà, tout cela illustre le manque de gestion cohérente du secteur, qui souffre toujours d’un défaut de pilotage et de gouvernance.
Décision du 12 février 2020
[1] Décret n°2018-767 du 31 août 2018
[2] Lire Direction[s] n° 168, p. 14
[3] Recours porté avec l'Unaf et l’Unapei.
Gladys Lepasteur
Publié dans le magazine Direction[s] N° 184 - mars 2020