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Aide à domicile : des métiers bientôt revalorisés ?

21/05/2020

S’attaquer d’urgence à une valorisation des métiers du domicile : c’est l’objet de la réflexion ouverte par l’Assemblée des départements de France (ADF) et la cellule d’urgence de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA). Un plan de bataille qui ne doit pas occulter le sujet de la prime que doit verser l’État, estiment les fédérations du secteur.

Le constat est partagé de longue date. Les métiers de l’aide à domicile souffrent d’un profond manque d’attractivité. Et pourtant, malgré les rapports et les alertes à répétition, le sujet est toujours au point mort. Leur investissement sans faille pendant la crise sanitaire se traduira-t-il enfin par une reconnaissance financière de ces professionnels ? C’est en tout cas la volonté affichée par l’Assemblée des départements de France, qui engage une réflexion sur une revalorisation des métiers de l’aide à domicile. A la manœuvre ? Frédéric Bierry, président du Bas-Rhin et de la commission Solidarité et affaires sociales de l’association, et Marie-Anne Montchamp, à la tête du conseil de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA).

Dépasser le "blocage" de la prime

« Deux raisons ont poussé à la création de ce groupe de travail. La première est conjoncturelle. A ce stade, il n’y a toujours pas de prime prévue par le gouvernement, malgré leur rôle majeur dans la crise sanitaire. La seconde est plus structurelle et ne date pas d’aujourd’hui. C’est celle de la faible rémunération de ces professions pourtant essentielles», souligne Frédéric Bierry. La prime annoncée par l’Etat pour les personnels des établissements accueillant des personnes âgées et handicapées n’a en effet toujours pas son équivalent pour les professionnels des structures financées par les collectivités.

Si les fédérations du secteur plaident pour que l’Etat assume son versement, ce dernier renvoie toujours la balle aux collectivités. « Je peux vous dire que nous travaillons avec elles dans l’espoir que puisse se déclencher un geste qui j’espère viendra de l’ensemble des départements », a ainsi réaffirmé Olivier Véran, le ministre de la Santé, à l’Assemblée nationale le 19 mai. Si tel est le cas, « chaque président de département versera une prime au regard de l’intensité de la crise sanitaire. Là où il y a eu moins de cas, et où la situation financière est plus délicate, ce versement sera plus aléatoire », prévient Frédéric Bierry.

Des solutions partagées « au plus vite »

De quoi attiser le sentiment d’injustice des professionnels sur le terrain, d’autant que le « Ségur de la santé » annoncé par le gouvernement prévoit pour l’instant une revalorisation des carrières uniquement dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes.  Même si Olivier Véran l’affirme : « L’aide à domicile fera bien partie des discussions car je l’ai dit : il ne peut avoir de silos ville, hôpital, médico-social. »

Dans ce contexte, « travailler sur la question des salaires prend encore plus d’importance», souligne Marie-Anne Montchamp. Le groupe de travail ad hoc rassemblant représentants des collectivités et une émanation de la cellule d’urgence de la CNSA a tenu sa première séance le 18 mai et entend mettre les bouchées doubles. « Mon souhait est que nous arrivions à une vision partagée pour faire des propositions au plus vite, d’ici un mois. Il faut mettre les choses à plat et voir comment on peut construire des réponses adaptées», expose Frédéric Bierry.

Objectif : créer une plateforme sur laquelle pourront ensuite s’engager des négociations. « C’est la première marche pour être efficace. Définir des objectifs et les moyens d’y parvenir. Et, si pour l’instant, nous travaillons sur les structures sous la responsabilité des départements, nous n’oublions pas celles qui ne relèvent pas du même modèle économique», détaille Marie-Anne Montchamp.

Quel financement ?

Des discussions suivies de près par les fédérations de l’aide à domicile. «C'est un signal positif de l'ADF sur le sujet central des rémunérations et parcours», salue Hugues Vidor, le directeur général d'Adedom. « La marche doit être haute. Il faut un geste clair avant l’été, période où nous manquons toujours de personnels. Avec le contexte sanitaire, les difficultés vont être deux fois plus importantes », prévient Guillaume Quercy, président de l’UNA. « Un avenant majoritaire relatif aux rémunérations et classifications a été signé. Il décloisonne les carrières et impacte la convention collective pour arriver à des salaires supérieurs au Smic. Il faut qu’il soit agréé par l’Etat et financé par les départements. » Un sujet sur la table du groupe de travail, confirme Frédéric Bierry.

Mais qui nécessite de parler rapidement finances. « Il faut mettre en regard cette politique publique avec le coût correspondant et cela ne peut fonctionner qu’à l’échelle des territoires. Bien sûr, cela se paye et il faudra déterminer la part de chacun », souligne l’élu qui pointe les difficultés financières rencontrées par les collectivités. En clair : l’Etat devra lui aussi mettre la main à la poche. 

Les projets de loi organique et ordinaire relatif à la dette sociale présentés le 20 mai devraient apporter du grain à moudre aux discussions. Le gouvernement s’y engage à réaffecter une recette spécifique supplémentaire au financement de la prise en charge de la dépendance à hauteur de 0,15 point de la contribution sociale généralisée (CSG), soit 2,3 milliards d’euros. Le tout via un transfert entre la Caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades) et la CNSA à partir de... 2024. «Reste à en mobiliser a minima les deux tiers pour le domicile et pas aux solutions d'hier», souligne Guillaume Quercy.

Chat échaudé craint l’eau froide

En attendant, une concertation sera menée «dans les prochaines semaines» avec les partenaires sociaux, les collectivités et les acteurs pour définir les solutions de financement nécessaires à la création d’un 5e risque (ou nouvelle branche de sécurité sociale) relatif à l’autonomie des personnes âgées et handicapées. Mais aussi pour plancher sur « les contours des mesures » en faveur du grand âge qui seront traduites dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2021.

Agacé par les promesses à répétition, le président de l’UNA est prudent : « Nous avons du mal à faire encore confiance. Il n’en demeure pas moins que les départements sont les pilotes de l'action sociale dans les territoires. Ils doivent être à la hauteur sur la question des rémunérations comme l’Etat doit l’être en assumant le financement de la prime. Il faut en finir avec les parties de ping-pong entre les deux. »

C’est la raison pour laquelle Frédéric Bierry souhaite profiter de la réflexion pour revoir également le modèle de financement du secteur social et du médico-social. « La crise montre que le périmètre géographique des Agences régionales de santé (ARS) est bien trop grand pour les spécificités des territoires. Et il y a aussi une notion de responsabilité. Les élus ont des comptes à rendre aux habitants et on a bien vu comment cette responsabilité a pesé dans la réactivité notamment dans la gestion des équipements de protection, illustre-t-il. L’occasion de rebattre les cartes de la gouvernance du système ?

Laura Taillandier






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