Quelle précision la Cour de cassation a-t-elle apporté le 3 mai dernier?
Stéphane Picard. Pour la première fois, elle est venue affirmer clairement que le délai de prescription d’une action en requalification d’un CDD en CDI, fondée sur l’absence d’une mention obligatoire au contrat (durée minimale, nom du salarié remplacé…), court à compter du premier CDD « défaillant ». Le salarié dispose donc de deux ans à partir de la signature de son premier contrat pour solliciter une requalification en CDI sur cette base, ce qui pourrait de fait rendre caduques un certain nombre de procédures en cours dans le secteur. À une subtilité près toutefois : si la demande est motivée par une question de fond (comme par exemple le fait de pourvoir à un emploi permanent), le délai de prescription démarre cette fois à l’issue du dernier CDD conclu.
Qu’en est-il du formalisme du CDD ?
S. P. Il est lui aussi assoupli, comme le montre une décision du même jour. En l’espèce, selon la cour d’appel de Montpellier, la mention de « qualification professionnelle » du salarié absent devant figurer obligatoirement dans le CDD de remplacement devait s’entendre comme celle de sa qualification, mais aussi de sa catégorie, de son échelon et de son indice. Pas pour la Cour de cassation, pour qui la simple mention de l’emploi concerné suffit à remplir les obligations légales, dès lors que ce dernier renvoie bien à une qualification précise inscrite dans la grille de classifications annexée à la convention d’entreprise. Attention toutefois aux intitulés des « emplois maison » ou aux nouveaux métiers qui ne trouvent pas toujours de correspondance dans les principales conventions collectives du secteur : dans ce cas, les employeurs ont tout intérêt à faire preuve d’exhaustivité.
Ces décisions sont-elles isolées ?
S. P. Au contraire. Initiées par les ordonnances dites Macron, elles s’inscrivent dans un mouvement global d’assouplissement des règles qui concourent à renforcer la sécurité juridique des entreprises, en particulier en matière de CDD. Par exemple, un récent arrêt de février dernier qui a conclu que la signature de très nombreux CDD successifs n’était pas, en soi, la preuve qu’ils étaient destinés à pourvoir à un emploi permanent [1].
Cour de cassation arrêts n° 16-26.437 et n° 16-26.306 du 3 mai 2018
[1] Arrêt n° 16-17.966 du 14 février 2018
Gladys Lepasteur
Publié dans le magazine Direction[s] N° 165 - juin 2018