Dans son bras de fer avec l'État, l'Assemblée des départements de France (ADF) muscle son argumentaire. Son président, Claudy Lebreton, a rendu public une étude commandée par sept présidents de conseils généraux (1) concernant le principe constitutionnel d'autonomie financière des départements. Principale conclusion : cette autonomie, consubstantielle au principe de libre administration locale, est gravement menacée par les transferts, les créations ou les extensions de charges, insuffisamment compensés par l'État.
Non-compensation
Au rang des charges transférées, l'allocation personnalisée d'autonomie (APA), gérée par les départements depuis 2002. Selon l'étude, « l'écart entre la réalité du coût du financement de l'APA en 2010 et les projections faites en 2002 pourraient conduire le conseil constitutionnel à reconsidérer l'atteinte éventuelle du dispositif au principe de libre administration locale ». Depuis 2005, les départements sont également responsables de la prestation de compensation du handicap (PCH). « Alors qu'en 2007 seuls six départements ne voyaient pas leurs dépenses de PCH totalement couvertes par le concours de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, ils sont 48 dès 2008. » Ce, alors que « cette prestation génère des écarts entre les dépenses et les recettes qui progressent de manière exponentielle ».
Principes constitutionnels
Face à un État qui fait la sourde oreille, quelles sont les solutions pour les départements ? L'étude estime qu'ils pourraient mobiliser deux instruments juridiques. La loi permettrait « de prendre l'initiative d'un régime juridique équitable des compensations en prévoyant à la fois une régularisation générale des transferts non intégralement compensés et de nouveaux mécanismes de compensation pour les transferts futurs ». Autre outil (menace ?) : la question prioritaire de constitutionnalité, nouvelle modalité de saisine du Conseil constitutionnel, en vigueur depuis le 1er mars dernier, qui permet de faire constater une atteinte à un principe protégé par la Constitution. L'auteur de l'étude, le constitutionnaliste Dominique Rousseau, rappelle ainsi la valeur constitutionnelle des principes d'autonomie financière des collectivités locales, de libre administration locale et de compensation...
Conclusions particulièrement attendues : celles de Pierre Jamet, à qui le Premier ministre a confié une mission de diagnostic et de propositions concernant la consolidation des finances des départements fragilisés.
(1) Côtes d'Armor, Haute-Loire, Meurthe-et-Moselle, Meuse, Saône-et-Loire, Territoire-de-Belfort et Val-de-Marne
Noémie Gilliotte